GAEC La Roche – Caprins – 350 chevrettes et chevreaux au lait de vache et engraissés à la ferme

Saint-Hilaire-la-Palud (79)

La ferme en quelques mots

  • SAU : 312 ha
  • Ateliers : viande bovine, livraison de lait de chèvres, fromages de chèvres et viande de chevreaux
  • Commercialisation : vente directe (ferme et marchés) et en magasins spécialisés
  • UMO : 5,5 (2 associés + 1 salarié en fromagerie + 1,5 salariés en élevage + 1 à 40h/mois pour l’entretien des machines)
  • Volume produit : 200 000 L/an (70 000 L sont transformés en fromage)
  • Taille du troupeau 350 chèvres, 150 chevrettes de renouvellement et 200 chevreaux engraissés / an
  • Races présentes : Saanen et un peu d’Alpines
  • Alimentation des chèvres : pâturage, mélange fermier (foin, triticale, maïs), céréales, luzerne (tout est produit sur la ferme, sauf la luzerne)

Historique de la ferme

  • 1980 : Création de la ferme par les parents d’Emma
  • 2010 : reprise de la ferme par Emma et passage en bio puis en GAEC

La conduite de l’élevage des jeunes : colostrum thermisé et lait de vache non bio

Les mises-bas ont lieu entre février et avril, afin d’étaler la charge de travail.

Les chevreaux nés au moins 5 semaines avant Pâques seront engraissés. Les autres seront collectés à l’âge de 3 jours par un engraisseur en conventionnel, les éleveurs préférant se libérer du temps de travail. Ils considèrent également qu’après Pâques, l’engraissement ne leur rapportera plus assez puisque la demande chute drastiquement.

Ceux qui seront engraissés seront nourris au colostrum thermisé des mères, puis vendus à des abattoirs au bout de 5 semaines environ, alors qu’ils pèsent entre 8 et 12 kg. Ils sont aujourd’hui achetés par Loeul et Piriot et vendus en conventionnel, même si ce n’est pas le premier choix des associés du GAEC, d’un point de vue éthique notamment. En effet, les associés ont déjà testé une autre solution : les faire abattre en bio par un abattoir situé à Parthenay, puis les vendre à la ferme. Malheureusement le gain économique était trop faible et le temps de travail nécessaire trop important pour qu’ils puissent envisager de poursuivre l’activité.

Les chevrettes, quant à elles, sont nourries le 1er jour au colostrum thermisé des mères, puis elles passent au lait de vache non bio d’un éleveur voisin, lait lui aussi thermisé pour éviter tout risque sanitaire et faciliter la digestion. Grain, foin et paille sont introduits vers la fin de la phase lactée, qui se termine avec un sevrage autour de 16-18 kg.

Si les conditions le permettent (notamment car le terrain est parfois trop humide), les chevrettes sont sorties du bâtiment, sinon elles resteront à couvert pendant les saillies et sortiront avec le reste du troupeau, deux mois avant les mises-bas (qui auront lieu pour rappel entre les mois de février et d’avril). Si la majorité des chevrettes élevées viendront renouveler une partie du troupeau, certaines sont parfois vendues à d’autres éleveurs pour venir compléter ou former un troupeau.

L’utilisation de lait de vache présente de nombreux avantages selon les éleveur⋅ses, notamment en termes de coût mais aussi au niveau sanitaire, pour réduire la pression parasitaire sur les bovins et les caprins, qui ne sont pas affectés par les mêmes parasites.

Comment engraisser 350 chevrettes et chevreaux chaque année ?

Même si une partie des chevrettes et des chevreaux naissant chaque année est livrée à des engraisseurs en conventionnel, ce sont près de 350 jeunes caprins qui sont engraissés chaque année, malgré la faible rémunération qui y est associée.

Mais pour élever un si grand nombre de jeunes caprins, les éleveurs préconisent d’être très vigilant au niveau sanitaire. C’est d’ailleurs pour cela qu’ils ont fait le choix du lait de vache thermisé, la thermisation permettant d’éviter la transmission de CAEV et facilitant la digestion des jeunes. En complément, ils insistent sur le nettoyage minutieux des abreuvoirs, l’apport de nouveau paillage tous les jours, le besoin d’avoir suffisamment d’espace pour les lots, l’apport régulier d’alimentation…

En plus de réduire les risques parasitaires, tous ces efforts permettent aussi de réduire le stress des chevrettes, donc de diminuer les risques de voir apparaître des maladies ou des virus qui profiteraient d’un état de faiblesse des animaux pour s’exprimer, tels que le CAEV. Le lait qu’ils donnent à leurs chevrettes n’est cependant pas bio, mais le cahier des charges le tolère dans leur cas afin de lutter contre le CAEV (cf. cet article pour plus de précisions).

L’accent est également mis sur une gestion des pâtures adaptée à la lutte contre les parasites, en retardant autant que possible le retour sur des parcelles ayant déjà été pâturées notamment, et en faisant se suivre les troupeaux de bovins et de caprins, qui ne valorisent pas les mêmes végétaux et ne partagent pas les mêmes parasites, afin de disposer d’une surface pâturable plus conséquente.

Le système mixte : un système pratique qui permet d’adapter les volumes transformés

« L’intérêt du système mixte est de pouvoir gérer ses volumes en fonction de l’état de la demande à la fromagerie, de faire passer des volumes de lait beaucoup plus importants ». C’est ainsi qu’Emma nous a résumé l’intérêt que revêtait pour elle le fait d’être en système mixte, c’est-à-dire d’à la fois transformer une partie de sa production laitière en fromage (ici 70 000 L/an) et de vendre le reste en lait cru (130 000 L/an) à une laiterie.

Ainsi, quand les associés témoignent : « On a eu des passages compliqués avec une qualité du lait qui avait baissé, donc il a fallu adapter notre production de fromage, mais désormais c’est réglé et on peut à nouveau augmenter le volume transformé », c’est que le départ à la retraite des parents d’Emma a laissé un vide, de nombreux savoir-faire sont partis avec eux. Ainsi, la qualité du lait a baissé car la conduite du troupeau était plus compliquée, et il a donc fallu réduire la quantité de lait transformée. Le GAEC La Roche a su dépasser cela et la quantité de lait transformée est en train de remonter progressivement, pour atteindre les 90 000 L de capacité du laboratoire situé sur la ferme. Cet objectif est notamment motivé par la meilleure valorisation du lait transformé en fromages et vendu en direct ou en circuits courts (dans des magasins bios) que celui vendu cru à une laiterie qui commercialise en circuits longs : 2,4 €/L pour le premier cas de figure contre autour de 0,90 €/L en moyenne pour le second.

En plus de la plus grande valeur ajoutée captée par la ferme dans le premier cas, la sécurisation par les éleveurs de leur circuit de commercialisation est plus grande que pour la seconde. Par exemple, jusqu’à il y a 2 ans, alors que les associés vendaient le lait de leurs chèvres à la fromagerie Chêne Vert, le contrat qui les liait à cette laiterie a été rompu brutalement, ce qui a obligé les associés du GAEC à trouver un nouveau débouché. C’est pourquoi ils commercialisent désormais leur lait en conventionnel avec Agrial, bien que cela les questionne à la fois éthiquement, financièrement, et en ce qui concerne la résilience de leur système. Ils témoignent en effet d’un manque à gagner de 30 000 €/an ainsi que d’une moins bonne reconnaissance de leur travail, alors même que leur fromage est lui-même vendu en bio.

Le GAEC est donc en quête de solutions qui lui permettraient d’avoir une meilleure valorisation de sa production caprine, de retrouver des débouchés en bio pour leur lait et de pérenniser leur système, après les péripéties de ces dernières années.