Zoom sur la filière légumes de plein champ bio en Hauts de France

Publié le : 1 avril 2019

En 2018, l’Observatoire Régional de l’Agriculture Biologique (ORAB) de Bio en Hauts de France s’est penché sur la filière régionale légume de plein champ bio. Synthèse des principaux résultats de cette étude.

Les cahiers de l'ORAB

L’Observatoire Régional de l’Agriculture Biologique en Hauts-de-France est un outil de prospective du Plan Bio régional.

Il vise à mesurer le développement de l’agriculture biologique en région et d’en analyser les enjeux socio-économiques afin de les partager avec l’ensemble des parties prenantes de la filière.

Ce premier numéro présente un état des lieux de la filière Légume de Plein Champ (LPC) bio en région Hauts-de-France.

 

 

Qu’est-ce que le légume de plein champ ?

La définition du LPC retenue dans le cadre de cette étude est celle proposée par AGRESTE qui considère le LPC comme « des cultures légumières sur des parcelles aussi affectées à d’autres cultures, en opposition aux parcelles maraîchères toujours consacrées à des cultures ». Dans le cadre de l’étude, nous avons enrichi cette définition en considérant les systèmes de production de LPC Bio en région Hauts-de-France dans lesquels le légume est cultivé sur une surface relativement importante (> 0,5ha par légume), de façon fortement mécanisée et destiné principalement
à un circuit de commercialisation long. Dans ce cadre, la pomme de terre a été intégrée à l’étude.

Une demande toujours forte

Le marché du légume de plein champ connaît un développement notable depuis quelques années, qui reste cependant inférieur à la croissance de la demande. En 2016, le marché français du légume bio représentait 626 millions d’euros en France, soit une augmentation de 28% par rapport à 2015.

Les magasins spécialisés sont leaders dans la distribution de légumes bio bien que les GMS soient particulièrement dynamiques depuis quelques années sur ce créneau, avec 190 M€ de chiffre d’affaires en 2016 (+ 49% / 2015) (Source : Agence bio / AND International).

La demande est vouée à se maintenir, voire augmenter, du fait d’une demande toujours croissante des consommateurs pour les légumes bio et de l’intérêt des magasins pour l’origine France, malgré des coûts de production plus faibles dans les pays voisins.

Des opérateurs diversifiés en région

Les opérateurs qui collectent des légumes bio en Hauts-de-France sont de plus en plus nombreux. En 2018, 23 opérateurs ont été recensés. Ils peuvent être classés selon leur degré de spécialisation et selon les débouchés de leur activité : marché de frais ou industrie.

Le schéma ci-dessous représente, de manière non exhaustive, les premiers metteurs en marchés présents dans le paysage du légume de plein champ bio à l’heure actuelle.

Contrairement au marché du LPC conventionnel, le légume de plein champ bio bénéficie d’un très fort de taux de contractualisation, évalué à 90%.

Le marché de frais reste majoritaire (environ 80% du volume produit en Hauts-de-France,) mais les légumes dédiés à l’industrie, et notamment à la surgélation et conserverie, sont en forte hausse depuis peu.

Une diversité de production avec une orientation forte vers le marché de frais

Côté production, la surface en bio reste très faible, avec moins de 1% des surfaces de légumes de plein champ en Hauts de France. L’assolement régional en légumes de plein champ bio présente une plus grande diversité que l’assolement conventionnel. Pour une surface totale évaluée à 1 368 ha de LPC bio, on compte 36 % de pommes de terre, contre 66 % en conduite conventionnelle.

A l’image des débouchés, les assolements bio s’orientent davantage vers des légumes destinés au marché de frais.

Historiquement, le légume de plein champ a été introduit dans les assolements de polycultures dans le but d’accroître la valeur ajoutée à travers une diversification principalement orientée vers la pomme de terre.

Aujourd’hui, les profils évoluent : de plus en plus de légumiers conventionnels se lancent désormais dans la production bio. Certes, les modifications d’itinéraire technique et les besoins en main d’œuvre pour la gestion de l’enherbement impliquent un changement substantiel sur les fermes. Pour autant, ces profils émergents possèdent déjà un certain nombre d’outils spécifiques et maîtrisent déjà la technique propre au métier de légumier.

Les pratiques évoluent également, que ce soit chez les légumiers convertis ou chez les producteurs bio qui introduisent du LPC. Ainsi, le recours à l’irrigation est de plus en plus présent. Le nombre d’espèces de LPC cultivées dans les fermes tend à augmenter et la part occupée par le LPC dans les exploitations est de plus en plus élevée.

Ces évolutions sont multifactorielles. La mise en place de l’irrigation peut s’expliquer par une volonté de sécuriser davantage les rendements de culture qui peuvent générer une forte valeur ajoutée sur la ferme mais ne sont pas sans risques. Les coûts liés à l’introduction de l’irrigation peuvent ainsi justifier une volonté d’accroître la part de l’assolement LPC. Ce besoin d’irriguer peut aussi venir d’une demande des collecteurs qui souhaite maîtriser d’avantager les volumes pour honorer les contrats en cours.

Les enjeux de la filière LPC bio

L’observatoire a identifié les atouts, faiblesses, opportunités et menaces de la filière légumes de plein champ bio en Hauts de France.

Le tableau suivant regroupe les opportunités et menaces identifiées :

Opportunités Menaces
Marché

Forte demande : évolution du marché bio et attrait pour l’origine France.

Région

Dynamisme de la filière qui contribue au renouvellement de la génération et à l’installation des agriculteurs.

Une région aux forts potentiels agronomiques qui pourra capter de la valeur ajoutée par le développement du LPC bio.

Un gisement d’emploi pour la région.

Filière

Fort potentiel de développement.

Système de production

Diversité qui engendre une hétérogénéité des coûts de production.

Intensification qui conduit à un risque de perte de fertilité, de perte d’autonomie des fermes, de dépendance économique.

Accord avec le règlement bio et les pratiques agricoles.

Filière

Risque de déséquilibre offre / demande.

Risque de pratiques non équitables de la part des opérateurs économiques.

Augmentation du nombre d’opérateurs dont les centres de décisions sont situés à l’étranger : perte d’information.

Des recommandations pour l’avenir de la filière

Suite à ces constats, un certain nombre de recommandations sont proposées pour l’avenir de la filière :

  • Assurer la complémentarité des systèmes de distribution de légumes pour répondre à la diversité des systèmes de production, du système maraîcher au système légumier de plein champ
  • Favoriser l’interconnaissance entre les systèmes de production
  • Mesurer la rentabilité du système de production à l’échelle de la rotation et non pas à l’échelle du LPC
  • Assurer la valorisation du légume de plein champ en synergie avec les autres cultures de la rotation (céréales, protéagineux, luzerne, cultures de diversification) en favorisant les coopérations entre collecteurs de légume de plein champ et collecteurs de céréales protéagineux pour dépasser les intérêts particuliers et préserver les intérêts de l’ensemble de la filière
  • Développer les bonnes pratiques de contractualisation : emblaver ce qui est commercialisé ; expérimenter des conventionnements multipartites ; expérimenter des dispositifs de construction du revenu contractualisés (ex : dispositifs basés sur un objectif de CA à l’hectare), etc.
  • Dans un contexte de marché porteur, s’assurer que les producteurs connaissent les exigences de la production de LPC : main d’œuvre, maîtrise technique, mécanisation…
  • Favoriser l’émergence de collectifs agricoles pour relever les défis de production : mutualiser le matériel, partager la main d’oeuvre, mutualiser les compétences.
  • Maintenir un équilibre entre un degré d’autonomie suffisant des producteurs et une offre de services pertinente (fourniture d’intrants, logistique, conseil technique)
  • Mettre en place des outils de partage d’information et de régulation permettant d’anticiper un déséquilibre du marché.
  • Au-delà de l’accompagnement de la conversion des producteurs, encourager la conversion des pratiques des acteurs de l’aval de la filière pour mieux s’adapter aux particularités de la bio.

Le dossier complet est disponible en téléchargement :