La ferme des MASSON, des céréaliers se tournant vers les légumes bio

Publié le : 15 février 2017

Le nombre de producteurs bio et les surfaces sont en constante augmentation, et notamment sur la filière des légumes bio. Installation, transmission, conversion : toutes les voies existent, amenant une diversité de pratiques au sein de la filière. Que se passe-t-il pour un céréalier qui se lance sur les légumes bio ?

Pouvez-vous nous raconter l’histoire de votre ferme …

Mme MASSON (NM): Nous sommes installés en 1984. Nous avons débuté avec nos beaux parents sur le GAEC familial de 137 hectares dans l’Oise (Picardie-Hauts de France). La ferme était une exploitation conventionnelle classique de la région avec une production de céréales (blé, maïs), de betterave sucrière et de colza. Quand mon mari est arrivé sur la ferme, il s’est intéressé aux cultures plus spécialisées comme le blé meunier ou la multiplication de semences pour se diversifier et étaler les rotations. Préparatrice en pharmacie de métier, je suis arrivée sur la ferme en 1993. Aujourd’hui notre fils, Corentin, vient de nous rejoindre comme salarié. Nous embauchons aussi des salariés saisonniers pour le désherbage des légumes. Notre objectif serait de pérenniser d’autres emplois.

La ferme en bref :

* Terres limono argileuses dans l’Oise
* 3 ETP + salariés saisonniers
* Surface de 260 ha dont 108 en bio en 2016 :
– 13ha de pommes de terre bios Agria, Allians (env 25T/ha)
– 6ha de carottes bios Norway (40T/ha attendues)
– 3.35ha de betteraves rouges bios
– 85.65ha de céréales bio
* Commercialisation : Biocer pour les céréales, Norabio pour les légumes

Et votre conversion, comment s’est-elle déroulée ?

NM : Nous nous sommes convertis en 99. Lors de mon stage à l’installation, j’ai rencontré une personne qui faisait du bio près de chez nous : cela semblait donc possible dans notre région. Cela a réveillé en moi l’idée que l’on pouvait travailler autrement. Il nous a fallu 6 ans pour mûrir cette réflexion. On a d’abord converti un quart de la ferme sur 5 ans grâce au suivi de l’ABP sur des rotations de grandes cultures bio. Mais, ce qui a freiné la suite de notre conversion, c’est peut être que tout fonctionnait bien sur la betterave sucrière conventionnelle: une filière organisée et des rendements très satisfaisants. Or cette filière n’existait pas en bio. Il y avait aussi la peur de ne pas réussir, car on avait trouvé très peu d’infos sur la culture bio, même lors de nos formations agricoles.

Pourquoi avez-vous introduit des légumes bio dans votre rotation ?

NM : Comme nous souhaitions continuer à convertir nos terres en

bio, il fallait trouver une culture bio qui remplace la betterave sucrière et qui soit aussi à haute valeur ajoutée. Les légumes bio intéressaient notre fils. Cela a débuté par la chicorée car un transformateur belge en recherchait. Puis on s’est lancé dans la carotte bio (2012), la pomme de terre (2015) et récemment la betterave rouge (2016) toujours avec un suivi ABP. Aujourd’hui, nous avons arrêté la chicorée, peu compatible avec la carotte.

L’accompagnement de l’ABP

La ferme bénéficie d’un accompagnement par un technicien de l’ABP. Il s’agit d’un suivi technique des semis jusqu’au suivi des frigos. Il apporte son conseil sur les choix variétaux, réalise des caractérisations de cultures pour les estimations de récolte et évalue la quantité et la qualité des lots. Plus d’information ici et voir l’événement salon Terreau Bio

Qu’est ce que ces cultures ont changé pour vous sur le terrain ?

NM : l’arrivée du légume dans une rotation de céréales amène de nombreux changements ! Le légume de plein champ est une production pointue qui demande beaucoup d’attention. Il faut passer souvent, être méticuleux et cela demande aussi d’investir dans un matériel spécialisé. C’est surtout plus de technicité, plus de désherbage aussi, notamment manuel. Du coup, cela nous a amené à embaucher de la main d’œuvre. Ce facteur est à prendre en considération…parce que les céréaliers ont perdu l’habitude de gérer de la main d’œuvre ! Dans notre région, ces cultures nous ont aussi poussé à installer l’irrigation afin d’obtenir une qualité satisfaisante.

Comment voyez-vous l’avenir ?

La ferme ayant développé ses surfaces, la bio s’est aussi développée. Aujourd’hui sur 260 hectares, 108 sont en bio. En 2015, la ferme a été séparée en deux entités juridiques distinctes : une structure conventionnelle et une EARL 100% bio. Nous cherchons à nous perfectionner et diversifier les légumes bios de plein champ. Chaque année, des terres de l’exploitation conventionnelle sont converties et cédées à la ferme bio et nous allons continuer. A terme, nous cherchons le 100% bio. En tout cas c’est ce que j’aimerais transmettre à mon fils !

 

Au-delà des céréaliers qui se diversifient, certains légumiers conventionnels de Picardie s’intéressent aux légumes bios. D’ici les prochaines années, il y aura des conversions dans ce sens. Et cela soulèvera les problématiques liées à la mixité du bio et non bio aujourd’hui autorisée sous certaines conditions dans le règlement. Le réseau FNAB souhaite qu’à terme cette mixité soit transitoire (par ex sur 10 ans max). A voir comment le concrétiser.

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