Techniques Culturales Simplifiées : les producteurs bio vendéens s’y intéressent

Publié le : 1 juin 2018

Les Techniques Culturales Simplifiées (TCS) intéressent de plus en plus d’agriculteurs, qu’ils soient en conventionnel ou en bio. Les motivations sont multiples : certains souhaitent diminuer les charges sur leurs exploitations en limitant les passages d’outils, d’autres souhaitent en finir avec le labour et le travail profond du sol, vu comme un non-sens agronomique. Par ailleurs, la conduite des cultures en bio (gestion de la pression adventices et implantation des cultures) génère fréquemment un travail du sol plus important par rapport à un système plus classique (labour, déchaumages, faux semis).

Tous les agriculteurs bio ayant recours aux TCS doivent relever les mêmes défis : gérer les adventives avec un travail superficiel du sol ou sans travail du sol et maintenir la fertilité des sols (maintien d’une bonne structure sur le long terme). Encore peu de références existent sur le sujet des TCS en agriculture bio, mais beaucoup de producteurs expérimentent à l’échelle de leur exploitation (voir le recueil d’expériences de la FNAB sur ce sujet), il est donc indispensable de capitaliser ces informations.

Plusieurs types de couverts

Passer des couverts « administratifs » aux  couverts « agronomiques », tel est le chemin parcouru par des agriculteurs du groupe TCS bio de Vendée. L’implantation de couverts peut avoir plusieurs finalités : la couverture du sol pour éviter le lessivage des éléments minéraux et maintenir la vie du sol, mais aussi la production de biomasse en fourrage ou pour la restitution au sol, le maintien de la structure du sol et l’apport d’azote (avec les légumineuses) ou encore la gestion du salissement d’une parcelle.

Les couverts estivaux

Ils sont implantés dès la moisson et en place généralement de juillet-août à octobre. Ils sont suivis par un couvert hivernal. Leur finalité est la couverture du sol pour éviter le lessivage, mais peut être également le nettoyage d’une parcelle (avec des plantes allélopathiques comme le sarrasin, le sorgho…) ou encore la production de biomasse (si les conditions climatiques sont favorables).

Mathieu Careil, polyculteur-éleveur à Saint Juire Champgillon (85) témoigne :

« Cette année avec des conditions climatiques difficiles, on a eu peur d’être juste en stock de fourrage. Nous avons donc décidé d’implanter un couvert d’été  (moha, trèfle d’Alexandrie et trèfle flèche) après de l’orge pour en faire de l’enrubannage ».

Exemples de couverts estivaux : Sorgho fourrager ou trèfle d’Alexandrie avec de la moutarde ou encore tournesol.

Les couverts hivernaux

Ils sont implantés à l’automne avant une culture de printemps ou d’été. Ils contiennent une ou plusieurs espèces avec une ou plusieurs légumineuses pour enrichir le sol en azote. Exemples de couverts hivernaux en mélanges : Vesce, trèfle incarnat, phacélie, moutarde et radis fourrager ou pois, avoine, trèfle incarnat et RGI.

Les couverts sous céréales

Couverts sous céréales. Pâturage de prairie le 24 août, derrière un mélange triticale– pois–avoine, moissonné début juillet

Luc et Fabienne Friconneau, éleveurs laitiers aux Rives de l’Yon en Vendée, sont en agriculture bio depuis 8 ans et en TCS depuis 11 ans. Toujours en recherche d’innovation, ils cultivent depuis 2010 des prairies céréalières.

« L’objectif des prairies céréalières est de gagner en autonomie en paille et en grain, tout en maintenant une couverture permanente du sol »

Les céréales (épeautre et avoine majoritairement) sont implantées en TCS avec une bêche roulante en octobre, dans une prairie multi-espèces. Les vaches pâturent dès que les conditions le permettent (de février à avril) et de nouveau une fois le battage des céréales effectué. La production d’une telle prairie céréalière est de 10 T de MS/ha. 50 % des 130 ha de surfaces en herbes sont implantés de la sorte sur l’exploitation. Cette année, 80 vaches ont pâturé du 1er au 20 juillet sur 2 ha, sans apport de fourrage au champ, « c’est aussi un gain de temps de travail important » ajoute Luc.

Le travail superficiel du sol

La réduction du travail du sol peut s’effectuer par étapes Les opérations du travail du sol varient en fonction de trois critères (Labreuche et al. 2007) :

  • La profondeur de travail (travail superficiel > 15 cm)
  • L’existence ou non d’un retournement de la surface : défini par une inversion des horizons, un enfouissement plus ou moins partiel des résidus de culture initialement en surface ainsi qu’une dilution des éléments initialement concentrés en surface
  • Le degré de mélange des horizons.

Certains agriculteurs en TCS bio continuent à avoir recours au labour : « Il vaut mieux préférer un labour agronomique que 5 ou 6 passages d’outils dans un parcelle » précise un agriculteur du groupe TCS bio de Vendée. Mathieu Careil ajoute : « On peut se passer du labour mais il faut trouver d’autres outils pertinents ». Cette année au GAEC Careil, un Rotavator prêté par un voisin a été utilisé. Il a permis d’extraire les mauvaises herbes du sol avant de les laisser griller en surface tout en nivelant le sol : « La parcelle n’avait pas été aussi propre depuis plusieurs années ».

Le semis direct

Le semis direct (SD) exclut tout retournement du sol. La zone travaillée se situe entre 3 et 8 cm. Le GAEC Careil a acquis un semoir en semis direct en 2016 avec l’aide d’un financement régional PCAE.

Mathieu Careil liste les nombreux avantages du semis direct : « Il nous permet de nombreuses économies, en temps et en carburant : avant nous faisions 2 déchaumages ». Il ajoute :

« Le semis direct conserve aussi la fraicheur du sol et ne bouleverse pas les horizons du sol, ce qui limite le développement des adventices ».

Au GAEC les Jonquilles (85), le semis direct permet de ressemer des prairies dans une prairie en place, d’implanter des méteils dans une prairie mais aussi d’implanter des mélanges d’été en direct juste après la récolte des céréales ce qui limite donc considérablement le travail du sol.

Semis de prairie dans prairie en place grâce à un semoir de semis direct

La vie du sol

« Nourrir le sol, avant de nourrir la plante » est une réflexion que plus en plus d’agriculteurs ont. Luc Friconneau ironise en disant que sur sa ferme il doit nourrir « ses vers de terres ET ses vaches ! ». Observer son sol, réfléchir aux apports de matière organique (nature et fréquence) mais aussi de calcaire, font partie des réflexions des agriculteurs qui s’intéressent aux TCS. Ouvrir son sol et l’observer est riche d’enseignements.

En Vendée, un nouveau groupe d’échanges sur les TCS en bio vient de se constituer avec 22 fermes engagées. Le groupe a répondu à un appel à projet ECOPHYTO 30 000 et souhaite produire des Itinéraires Techniques en TCS bio. Rendez-vous dans quelques années, pour en savoir d’avantage.

Article rédigé par Marianne DUNCOMBE (GAB 85)

Pour aller plus loin