Micro Maraichage Bio en PACA – les maraichers expérimentent – 3ème saison

Publié le : 30 novembre 2021

La dernière saison d’expérimentations paysannes du projet MiMaBio a eu lieu en 2020. Retours sur les différents essais de cette troisième saison d’expérimentation, dans les départements du Vaucluse, des Bouches-du-Rhône, des Alpes-Maritimes et du Var.

Cette dernière année d’expérimentations paysannes s’est bien déroulée, avec certains producteurs déjà engagés les années précédentes qui ont approfondi leurs essais et l’arrivée de nouveaux maraîchers. Malgré quelques aléas, tous ont été satisfaits de cette dernière saison et des résultats qui en ont découlé.

Les expérimentations paysannes visent à répondre à une question précise émise par le maraîcher sur ses pratiques. Les résultats, très liés au système de production, aux pratiques du producteur, ne sont donc pas généralisables tels quels. Le GRAB apporte ses points de vigilance sur les protocoles et la mise en place de l’essai, tout en assurant un suivi technique nécessaire pour l’interprétation des résultats.

En 2020, 17 maraîchers ont mené des essais, sur les thématiques suivantes :

  • La gestion de la fertilité du sol : 1 essai sur la réduction du travail du sol.
  • La couverture du sol : 6 essais sur les paillages, engrais verts, apports de BRF et enherbements de passe- pieds.
  • Matériels et techniques : 6 essais sur les techniques de désherbage, palissage, irrigation, semis et essais variétaux.
  • Soin des plantes: 3 essais sur les préparations biodynamiques homéopathiques, les extraits fermentés de consoude et la pulvérisation de kéfir de lait.
  • Association de cultures : 2 essais (courges/haricots et tomates/haricots nains).

Essais dans les Alpes-Maritimes

Les principales thématiques abordées en 2020 étaient la couverture des sols, l’association de cultures, la comparaison de matériels et le soin des plantes.

Sur la thématique de la comparaison de matériels, un des essais visait à évaluer deux types de tuyaux d’irrigation neufs : le goutte-à-goutte et le microporeux. Ce dernier, malgré un prix plus élevé, s’est révélé moins fragile, moins sensible à la dilatation en été et fonctionnel à basse pression s’il est bien en contact avec le sol. Une seconde évaluation, après 3 à 4 ans d’utilisation, serait intéressante pour approfondir ces premiers résultats.

Le second essai visait à comparer et à analyser les impacts environnementaux de filets à ramer en coton et en plastique. Peu de différences au niveau de l’itinéraire technique ont été constatées, mais les résultats de l’ACV (Analyse de Cycle de Vie) ont démontré les lourds impacts sociaux et environnementaux de la production de coton : rarement en commerce équitable et en agriculture biologique, cette culture aux impacts très toxiques et nocifs demeure aussi très gourmande en eau, en intrants et en surfaces.

L’essai portant sur la couverture de passe-pieds comparait trois modalités : paille, trèfles blancs et serpolets, avec un objectif de limiter le désherbage et de fertiliser le sol. Les résultats ont démontré une implantation très rapide du trèfle, adapté aux conditions séchantes et au piétinement. Le serpolet demeure plus lent à se développer et attire de nombreux insectes.

Sur la thématique de l’association de cultures, l’essai portait sur les courges Mini Butternut et les haricots à rames Borlotto. Après calcul du Land Equivalent Ratio (LER), aucune différence de rendement a été observée entre les modalités d’association et de cultures simples. Des difficultés culturales ont également été rencontrées, avec un envahissement de la parcelle par les adventices.

Essais dans le Var

En 2020 les essais sur le semis de carottes-radis et sur l’association tomate-haricot nain se sont poursuivis. Les deux autres maraîchers se sont lancés sur des tests comparatifs d’itinéraires techniques : destruction d’un engrais vert et gestion des adventices.

L’objectif de l’essai d’association tomate-haricot nain était de pouvoir comparer la productivité ainsi que la pénibilité du travail entre les modalités en culture seule et en association. Les rendements obtenus ont été équivalents entre les deux modalités. Le tuteurage des tomates est à suivre de près en association, car la chute des plants peut gêner le développement des haricots. L’association n’a pas entraîné de perte de chiffre d’affaires ni de plus-value économique. La récolte des haricots a semblé être moins pénible en association (pas de rangs au centre de la planche). Le maraîcher pense poursuivre cette association, en testant de nouvelles organisations sur la planche.

Chez la maraîchère du groupe, les deux années de tests de semoirs sur sol motteux ont mené en 2020 à tester le semis sur un lit de compost, avec un semoir JP1. Sur chaque planche moitié a été recouverte de 3 à 5 cm de compost de déchets verts criblés à 10 mm. Le semis a été fait sur ce lit de compost ou directement sur la terre ameublie. L’effet du compost sur la levée s’est révélé plus intéressant avec les petites graines de la carotte, sans montrer d’amélioration pour le radis (levée satisfaisante avec et sans compost). Sur carottes, le compost a limité fortement l’enherbement par un effet d’occultation, ce qui a diminué le temps de désherbage. Pour cette maraîchère, le semis sur lit de compost est très pertinent pour les carottes, mais pas pour les radis où les bénéfices sont moindres.

Les deux autres essais n’ont pas été très concluants. L’essai sur la destruction d’engrais vert a mis en avant la difficulté d’enracinement des salades dans le lit de compost (poreux et séchant) ; l’essai sur la gestion des adventices de carotte a rencontré des problèmes d’organisation qui n’ont pas permis de comparer l’efficacité des techniques.

Essais dans le Vaucluse et les Bouches-du-Rhône

En 2020, cinq essais sur six étaient dans la continuité de ce qui avait été fait en 2019, seul un essai était « nouveau » (impact du paillage sur la culture de fraises).

Sur certains essais nous ne pouvons pas conclure par manque de rigueur du protocole ou de mesures exploitables. Par exemple, l’essai sur l’impact de l’apport de broyat sur des cultures de pomme de terre et de courges n’a pas pu être exploité (cultures abandonnées). Aussi, sur le paillage des fraises, les mesures de rendement et temps de travail n’étaient pas assez rigoureuses, mais l’essai a quand même mis en évidence l’intérêt pour la paille et le broyat.

L’essai sur la gestion de l’enherbement de la carotte a mis en évidence l’intérêt d’associer le radis à la carotte, le rendement est satisfaisant et la récolte est pratique et facile. Concernant l’essai sur l’extrait fermenté de consoude) les mesures montrent un léger intérêt pour l’EF mais le manque de répétitions des mesures ne permet pas de conclure.

Pour la 2ème année consécutive nous avons testé une préparation biodynamique homéopathique sur la vigueur de plants de courgettes. La productivité et le développement racinaire semble plus important que sur le témoin mais les différences sont trop légères pour affirmer l’intérêt de la PBH, cependant le maraicher pense que le choix de dilution était incorrect il faudrait donc refaire cet essai avec une autre dilution.

Concernant le suivi de fertilité de planches non travaillées et non fertilisées/amendées, les cultures (fenouils et aubergines) montrent une bonne productivité avec des rendements similaires aux références bios et une quantité d’azote dans le sol fluctuant, assez faible mais jamais nul. Le sol a une structure ouverte avec de la porosité, de la matière organique et une forte activité biologique. Les 3 années de suivi ont permis de se rendre compte de l’intérêt agronomique de ce système (au bout de la 3ème de mise en place).

 

Les résultats obtenus sur les autres essais (non présentés ici) sont plus nuancés. Vous les trouverez détaillés sur la page internet MiMaBio de Bio de Paca.

Et la suite ? rendez-vous début 2022 !

Les trois années d’expérimentations ont été riches d’apprentissage, autant pour les maraichers que pour les animatrices/accompagnatrices-teurs. La mise en place et le suivi d’un essai paysan est complexe, en effet le protocole n’est jamais fixé et certaines mesures ne sont pas toujours exploitables du fait des imprévus (maitrisables ou non). Ces 3 années ont permis aux maraichers d’améliorer leur rigueur dans le test de pratiques, ils ont aussi développé leur regard critique pour analyser une pratique. Il en ressort néanmoins que la décision de changer ou d’arrêter une pratique ne résulte pas de la réussite ou de l’échec d’un essai sur une seule année ; en effet ce changement de pratique est le fruit d’un mécanisme plus profond qui prend en compte d’autres facteurs.

Nous avons tiré de forts enseignements de ces 3 années, nous finalisons un guide méthodologique qui sera diffusé à la fin de l’année. Tous les documents de diffusion (fiches protocoles, fiches résultats détaillées etc…) seront disponible cet hiver sur notre site internet. Nous vous attendons nombreux pour échanger sur cette thématique mais aussi sur la viabilité socio-économique des micro fermes maraichères lors de notre séminaire de fin de projet en janvier 2022 !

Pour plus d’informations, visitez la page internet MiMaBio de Bio de Paca.

Article corédigé par Mélanie Desgranges, Oriane Mertz et Marion Robert (réseau bio de PACA)