Découvrez les pratiques et techniques par filière
Je ne viens pas du monde agricole à proprement parler. Toutefois, il y avait une ferme dans la famille. J’ai été DAF (directrice administrative et financière) dans une entreprise pendant 17 ans avec un statut de double actif d’exploitante agricole. J’ai décidé de m’investir à 100% dans l’agriculture à compter de la conversion en bio de la ferme en 2006.
En m’installant sur la ferme, la conversion à l’agriculture biologique me semblait cohérente et logique par rapport à ma philosophie de vie. Cette reconversion professionnelle s’est amorcée par l’alimentation bio donc le développement de mon activité agricole ne pouvait être que bio.
Il y avait très peu de producteurs de prunes d’ente en bio à l’époque. C’était donc un défi que je souhaitais relever. Aujourd’hui, nous sommes 110 producteurs.
La Chambre d’Agriculture m’a aidée à monter le dossier administratif de la conversion puis m’a dirigée vers Agrobio47 pour un appui sur le long terme. A l’AG d’Agrobio47, lors de ma première année de conversion, le Conseil d’Administration m’a sollicitée et c’est de cette façon que je me suis retrouvée investie dans le réseau FNAB au niveau départemental, régional et désormais national.
Il y a différentes formes de vergers de prune en bio. Certains producteurs fonctionnent en haies fruitières, d’autres avec des vergers en axe, de la haute densité (près de 1000 arbres/ha), et des vergers plus standards à 350 – 400 arbres/ha. Certains sont sur une logique de production rapide et intensive avec arrachage des arbres après 10 ans. Et d’autres producteurs ont un rapport plus long terme de l’arbre. Il y a vraiment de tout en termes de gestion des pruniers. Le prunier d’ente était perte de vitesse, l’État a mis en place un plan de compétitivité pour redynamiser le verger. Cela a été géré par le BIP, le Bureau Interprofessionnel du Pruneau. Cela peut expliquer la grande diversité de pratiques.
Certains arbres sur la ferme ont plus de 40 ans mais nous avons procédé à un fort renouvellement, l’objectif étant d’atteindre un rendement moyen de pruneaux de 3T/ha . En conventionnel, ils atteignent 6T/ha sur les jeunes arbres, en moyenne. Certains montent à 10T/ha. J’aimerais démontrer qu’on peut arriver à vivre avec un système de production moins intensif mais mieux valorisé.
Au niveau de la récolte, il y a plusieurs possibilités : à la main, à la machine, sur filet. La récolte machine permet d’aller très vite mais cela créé, à mon sens du gaspillage, car des fruits tombent à terre et ne sont pas valorisés et comme les machines roulent dessus, cela ne me semble pas idéal. A quoi cela sert-il d’atteindre 10T/ha si une partie est perdue ?
Pour le séchage, les coopératives et OP de producteurs travaillent soit avec des stations collectives, soit le producteur a sa propre station. Le séchage est un poste important de charges financières (séchage au gaz). Un travail de recherche est mené pour baisser ce coût et voir également comment améliorer la conservation sans trop déshydrater le fruit afin de garder toute sa saveur.
En 2016, le production de pruneaux bio, c’est :
En 2016, 2 222 tonnes de pruneaux bio ont été achetées par les transformateurs (4,2 % de la récolte française). 2 193 tonnes ont été achetées aux O.P. et 30 tonnes achetées en direct aux producteurs.
Source : BIP – Le Bureau Interprofessionnel du pruneau est une interprofession regroupant les Organisations de Producteurs (OP), les coopératives et les transformateurs. Le BIP produit des chiffres sur la production de pruneaux bio.
Le frein majeur, c’est la chute de rendement qui peut être très importante lorsqu’on part d’un verger intensif. Passer en bio sans revoir en profondeur son système me parait périlleux. C’est difficile de produire en bio sans une certaine philosophie.
Il faut essayer de retrouver un équilibre prédateurs-auxiliaires et ne pas juste remplacer les produits utilisés en conventionnel par des produits autorisés par le règlement bio. Développer une approche globale pour retrouver cet équilibre : pose de haies, de ruches traditionnelles ou pour les osmies (en savoir plus sur les osmies), et développer des refuges pour les pollinisateurs naturels comme les mésanges.
Il faut aussi effectuer une taille régulière chaque année pour aérer l’arbre. Je ne vois pas l’intérêt d’avoir une charge trop importante, je recherche plutôt un lissage des récoltes avec davantage de fruits charnus plutôt que beaucoup de petits fruits qui, pour moi, ne sont pas de qualité IGP pruneau d’Agen.
Un des soucis principaux rencontrés, c’est la cochenille du poirier. Nous avons réalisé des essais avec la station Invenio pour tester différentes méthodes pour les extraire des écorces. Nous avons essayé des passages au karcher à haute pression, mais c’est assez contraignant.
Autre problème : le monilia sur fleur et fruit. Avec le cuivre et le soufre, on arrive à s’en sortir, mais encore faut-il traiter au bon moment ! En fonction du vent, pluviométrie et température ! Les outils d’aide à la décision, comme Rimpro pour la pomme, seraient intéressants à adapter à la prune. L’équipement d’une petite station météo pour relever précisément ces indicateurs est intéressant.
Pour le carpocapse de la prune, j’ai essayé la confusion sexuelle pendant deux ans de suite mais le coût financier est important, notamment à cause de l’attache des plaques qui est long et fastidieux et n’a pas été très concluant sur mes vergers. Un des points majeurs, c’est que dès que j’ai des prunes véreuses qui tombent au sol, je nettoie mes vergers… à la main. Cela parait fastidieux mais cela me permet de vraiment faire baisser la pression pour l’année d’après. Aujourd’hui je n’ai que 3% de fruits attaqués par le carpo.
Sur le puceron, aucun intérêt, pour moi, de traiter avec des produits autorisés en bio qui sont néfastes pour les auxiliaires. Au début de ma conversion, j’avais pas mal de souci de pucerons. J’ai essayé le savon noir…sans succès. En fait, aujourd’hui, cela ne met pas en péril ma production. Les pratiques de fertilité jouent beaucoup sur les pucerons. Les apports de fiente de poule composté et les engrais foliaires complémentés en bore et zinc pour la mise en réserve sont importants mais doivent être bien gérés.
Il y a un peu de travail sur les variétés de prune d’ente. Les transformateurs aimeraient des prunes qui se dénoyautent plus facilement. Il existe une station INRA qui travaille en partenariat avec le BIP sur ce sujet. Ce que nous aimerions, un petit groupe de producteurs bio, c’est un travail plus fourni sur la résistance des nouvelles variétés au monilia. Faire en sorte que les vergers soient moins fragiles. On manque vraiment de recherches sur la prune d’ente.
Nous nous sommes regroupés entre producteurs bio de prunes d’ente. C’est encore informel mais l’une de nos premières actions a été de développer un partenariat avec la station Invenio. C’est la station régionale des fruits et légumes de Nouvelle Aquitaine. Les producteurs bio participent au financement des essais ! Nous discutons chaque année des thématiques à travailler en comité de pilotage.
La filière est organisée sur le pruneau, en conventionnel comme en bio. Le BIP est une des premières interprofessions à avoir vu le jour il y a 40 ans. Il rassemble les différents opérateurs de la filière et assure le développement du pruneau.
Une organisation recense les informations autour de la prune au niveau mondial, il s’agit de l’IPA, International Prune Association. D’après l’IPA, la disponibilité totale de pruneaux autour du monde, y compris les cultures et les stocks, était d’environ 355.000 tonnes en 2012.
Les États-Unis sont les plus gros producteurs de pruneau devant le Chili puis la France. Néanmoins les États-Unis connaissent une dynamique d’arrachage des vergers de pruniers au profit des fruits à coque qui se développent (noisette, amande).
Sur le pruneau, nous avons une IGP « pruneau d’Agen » qui nous permet de vraiment valoriser nos produits. Auparavant, il y avait différentes régions de production de prunes en France mais les autres bassins se sont petit à petit réduits.
Les ventes de pruneaux sont assez saisonnières : elles deviennent importantes à partir de l’automne , à la fin du séchage, et courent jusque mars-avril.
La valorisation du pruneau d’Agen bio est donc correcte mais nous manquons de pruneaux bio pour répondre à la forte demande du marché en bio. En effet, de plus en plus de consommateurs, en se tournant vers la bio, augmentent leur consommation de fruits et légumes et notamment de fruits secs. Nous ne sommes aujourd’hui que 110 producteurs de pruneaux bio, répartis dans différentes organisations de producteurs qui gèrent des volumes bio et conventionnels.
Nous avons monté un groupe bio au niveau des producteurs des différentes coopératives et OP au sein du BIP. C’est de la qu’est née une certaine envie de cohésion autour du pruneau bio et de recherche collective pour le développement de ce produit phare du territoire.
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