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Les maïs population sont des semences non-hybrides, c’est-à-dire non issues de la sélection semencière classique. Ces semences semables et re-semables sont issues d’un travail de sélection paysanne. Leur point commun ? Leur diversité génétique intrinsèque et donc leur capacité à évoluer in situ avec le terrain, la pratique et le climat. Les populations correspondent-elles bien aux besoins des agriculteurs des zones à potentiels moyens et contraintes pédoclimatiques maximales ? Pour le savoir, Agri Bio Ardèche a mis en place en 2017 un réseau d’agriculteurs « testeurs » des maïs population pour évaluer leur intérêt et comprendre les problématiques de ces maïs.
Peuvent-ils par exemple représenter un atout face aux restrictions légitimes d’irrigation, et pour conserver des cultures fourragères « à stock », atout important face aux incertitudes climatiques ? Peuvent-ils aider les éleveurs à réduire leurs frais de semences en tablant sur une organisation cohérente pour la multiplication et le maintien des qualités des populations ?
Un ensemble de 12 populations ou mélange de populations a donc été testé par les agriculteurs bio :
Compte-rendu des essais par Agri Bio Ardèche.
Emmanuel Delor et Maurice Champet du GAEC Marsan ont constaté « une très belle vigueur au démarrage, nettement plus forte que sur les hybrides ». Un constat partagé avec Antoine Ribes du GAEC Ribes. « La végétation a rapidement couvert les rangs » ce qui est un atout en culture biologique : l’enherbement est réduit avec un besoin de désherbage inférieur, et surtout les taupins peuvent faire moins de dégâts à la culture. Sur les semis réalisés à 430 m d’altitude au 25 mai, un ou deux binages ont été suffisants pour garantir une belle propreté des parcelles.
« Nous avons semé à densité réduite, c’est-à-dire 80000 pieds/ha, afin de ne pas nuire au rendement final, car toutes les populations testées sont tardives ou demi-précoces ».
C’est en effet une des difficultés rencontrées : la faible précocité des maïs population par rapport aux hybrides. Les indices ne sont pas décrits précisément à ce jour.
« Nous avons été impressionnés par le développement du charbon sur les populations » précise Emmanuel Delor. « Surtout sur les premiers rangs, peut-être moins au cœur de la parcelle. De nombreux pieds sont touchés, peut-être un sur quatre ! Du coup tous les épis ne sont pas riches en grain, mais cela ne semble pas avoir gêné la végétation. »
« A la formation du silo, c’était clairement assez noir ! A voir comment les vaches le mangeront, puisqu’il paraît que le charbon est riche en protéines ! »
NB : Le charbon du maïs est une maladie cryptogamique très fréquente en maïs, la spore est présente dans le sol et les débris de culture. Le charbon s’exprime généralement lors de blessures du feuillage (après une grêle, des dégâts d’oscinie…) ou lors de stress hydriques marqués. Selon Valérie Abatzian, lors des premières années d’introduction d’une population de maïs, il est très fréquent d’observer du charbon. Celui-ci recule ensuite. Le charbon transforme l’amidon du grain en protéines, et ne représente pas un problème alimentaire. Le risque est plutôt d’être une porte d’entrée pour des moisissures type Fusarium, plus gênantes car elles génèrent des toxines type œstrogènes qui peuvent entraîner des troubles de la reproduction.
« Nous irriguons tous les ans les maïs destinés à l’ensilage, autrement les pertes sont trop importantes sur nos terres sableux à faible réserve hydrique. Les populations se sont comportées aussi bien que les hybrides sur les terrains irrigués lorsque le rythme a pu être suivi. » précise Frédéric Lionneton, de l’EARL L’orée des bois.
En revanche, plus étonnant, dans les terrains non-irrigués (parcelles de multiplication) les populations ont réussi à se maintenir. Avec parfois des manques en épis et des taux de charbon importants, mais tout de même une biomasse intéressante.
Malgré les prudences à avoir, cela illustre bien une remarque faite par des éleveurs de la Loire : les populations pâtissent moins vite que les hybrides en cas de sécheresse. C’est un aspect particulièrement intéressant à creuser les années prochaines, pour voir quelle peut être la contribution des populations à moins d’irrigation.
Pour les maïs destinés à l’ensilage, à 400 m d’altitude sur sol moyen, les rendements oscillent entre 13.1 et 21.9 TMS/ha (rendement placette, à minorer d’1 à 2 TMS du fait de la coupe plus basse qu’à l’ensileuse et des pertes au champ). Ce qui constitue un bon rendement en conditions bio et au vu de l’année climatique, comparable aux rendements moyens des éleveurs en hybride.
« Pour moi qui fait de plus en plus d’ensilage d’épi, je suis plus réservé sur leur intérêt qu’en ensilage plante entière. En effet les plantes ne portent pas tous des épis très beaux, en tout cas c’est moins régulier qu’en hybride » précise Antoine Ribes.
Pour les maïs destinés au grain, en plaine du Rhône, les rendements oscillent entre 34 et 69 qx/ha. « En l’état c’est en-dessous de mon objectif économique de 90 qx/ha en hybride » précise Emmanuel Vallet, de l’EARL de Presles. « Il faut bien sur enlever les frais de semences en moins, qui correspondent en gros à un coût de 6 qx/ha ».
Les maïs les plus tardifs sortent logiquement les meilleurs rendements. Les populations testées sont cependant sorties de manière très hétérogène ce qui révèle une pollution génétique et doit donc faire relativiser les résultats présentés.
« Nous avons réalisé des analyses de valeur alimentaire sur nos silos population et hybrides. A ce jour, rien de problématique n’est constaté, les vaches le mangent aussi bien.»
Sur les analyses réalisées, en ensilage plante entière comme en grain, la conclusion qui s’impose est d’abord la richesse en protéines, qui ressort très nettement pour quasi toutes les populations et les conduites (en moyenne 78g/kg, comme la moyenne en hybride). En seconde analyse, la valeur énergétique est bonne mais un cran en-dessous de l’hybride (0.89 contre 0.92 UFL/kg). La digestibilité est aussi très correcte (71, équivalent à l’hybride). En résumé les populations sont aussi bonnes que la moyenne des hybrides (sur les valeurs moyennes du laboratoire Cesar). On peut constater une richesse un peu supérieure en cellulose (plus de rumination) et des taux minéraux similaires.
NB : valeur moyennes hybrides (Laboratoire Cesar 2017) : protéines 78g/kg ; UFL 0.92 ; dMO 72.9
Cette moyenne cache cependant des disparités importantes ! Dans les parcelles les plus soignées, les populations ont des valeurs très intéressantes, avec des taux de protéines qui frisent les 120g/kg de MS, ce qui équivaut à un bon enrubannage d’herbe.
Sur ce tableau représentant la population Aguartzan, une des plus cultivées en Rhône-Alpes, le rendement s’étale de 15 à 21 T MS alors que le taux de protéines passe du simple au double !
On pourrait spéculer en affirmant que les populations ont montré leur capacité d’adaptation en conduites variables : elles ne seront pas forcément les meilleures en rendement, mais tirent leur épingle du jeu partout !
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