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La commission arboriculture de la FNAB, en partenariat avec la commission arboriculture de l’ITAB, ont organisé un voyage d’étude conjoint les 20 et 21 juin derniers sur l’enjeu du matériel végétal en arboriculture biologique. En effet, les variétés d’espèces fruitières ont été développées depuis des décennies selon des critères qui ne sont pas adaptés pour l’AB ou le très bas niveau d’intrant. L’objectif du voyage : identifier des leviers et des initiatives innovantes pour développer une création variétale adaptée à la bio et aux spécificités de cette filière.
Une action phare a retenu l’attention. Celle du partenariat de long terme entre le Centre de Recherche Agronomique Wallon de Gembloux en Belgique (CRA-W), le Conservatoire Régional de Ressources Génétiques (CRRG) de Villeneuve d’Ascq et une association d’arboriculteurs : Novafruits. L’occasion de voir in situ le comportement de ces variétés de pommes développées en conduite biologique et de manière participative.
Ce voyage a aussi été l’occasion de revenir sur les derniers résultats de recherche et expériences concrètes autour de la biodiversité fonctionnelle et de la gestion de la tavelure. Zoom sur les principaux enseignements de ce voyage d’étude qui a réuni 21 participants de différents bassins de production.
Marc Lateur, Laurent Jamar, Alain Rondia et Alexis Jorion du CRA-W de Gembloux ont présenté leurs derniers résultats concernant l’arboriculture biologique. Ont été abordés en salle et sur les parcelles d’expérimentation du centre :
Téléchargez la présentation du CRAW et celle de Novafruits
Face au constat du manque de variétés adaptées à la conduite des vergers en agriculture biologique ou bas intrant, un partenariat de long terme s’est développé entre le Centre Wallon de Recherche Agronomique à Gembloux, le Conservatoire de Ressources Génétiques de Villeneuve d’Ascq et des producteurs de pommes et poires Belges et Français.
En 2014, ce rapprochement entre le CRA-W, le CRRG et des arboriculteurs s’est formalisé par la création de l’association Novafruits, regroupant actuellement 24 arboriculteurs. Les arboriculteurs participent activement aux travaux d’identification et d’évaluation d’anciennes et de nouvelles variétés de pommes développées par les centres de recherche. L’évaluation des variétés porte sur la tolérance aux maladies et ravageurs, leurs caractéristiques agronomiques, leur rusticité et leur originalité pour se différencier de la production internationale. Les producteurs font des visites régulières des parcelles et concluent leur évaluation par une dégustation des fruits.
L’originalité de cette longue expérimentation réside dans le fait qu’elle est menée à grande échelle, sur plusieurs hectares, comme en production arboricole. Les arbres sont observés/notés pendant plusieurs années sur une parcelle sans aucun traitement fongicide, puis en verger en condition de production biologique en limitant les intrants phytosanitaires. Ce type de sélection participative s’est fortement appuyé sur les variétés locales et donc adaptées au terroir.
Après plusieurs centaines de croisements et milliers de semis, une première variété de pomme a été sélectionnée : COXYBELLE. Cette nouvelle variété de pomme a obtenu le « Certificat d’Obtention Végétale » et les premiers arbres ont été plantés dans les vergers des producteurs membres de Novafruits. La pomme Coxybelle a une couleur orangée, une forme régulière et allongée, bien sucrée et riche en arômes typiques. Près de 4 000 arbres de la variété ont été plantés par 10 producteurs wallons au printemps 2016. Contact : m.lateur[at]cra.wallonie.be
Au-delà de l’implication des producteurs dans le processus de sélection, un des points remarquables de ce partenariat est le fonctionnement de l’association de Novafruits.
L’originalité de la démarche intervient principalement au niveau de l’organisation et de la gestion des variétés entre l’obtenteur, le pépiniériste et le producteur. En effet, les centres de recherche, qui sont les obtenteurs, ont développé une convention tripartite entre l’association et les membres de Novafruits, leur donnant une exclusivité pour la France des obtentions avec COV pendant 10 ans. Un contrat est aussi signé annuellement entre les producteurs membres et l’association. Novafruits et les centres de recherche sélectionnent ensuite un ou des pépiniéristes pour le greffage des arbres selon des critères de confiance et de qualité du travail.
Une fois les conditions d’adhésion réunies (vergers 100 % bio, siège d’exploitation et vergers situés dans les régions Hauts-de-France, Wallonie ou Normandie et dossier de candidature), les producteurs adhérents peuvent tester les variétés dans leurs vergers professionnels. En 2018, 17 nouvelles variétés de pommes et 5 variétés anciennes de pommes et poires ont été proposées pour le greffage. Trois sont en cours d’examen pour leur « Certificat d’Obtention Végétale » et sont donc protégées juridiquement. Après implantation, les équipes des centres de recherche accompagnent les producteurs dans les observations.
Deux visites ont permis d’observer ces nouvelles variétés en conditions de vergers productifs, notamment chez René Stiévenard et Pierre et Amandine Lecerf. L’ITAB et la FNAB remercient tous les intervenants de ces deux riches journées qui nous ont accordé du temps, transmis leur expérience et communiqué leur enthousiasme.
Sabine Bonnot, présidente de la commission arboriculture biologique de l’ITAB conclut : « Novafruits est l’aboutissement opérationnel fructueux d’un travail d’abord exploratoire qui a commencé depuis plus de 15 ans sur l’évaluation, l’identification des géniteurs adaptés à leurs conditions locales (Nord), et sur la création variétale. Il faudrait créer des démarches similaires sur les autres bassins et zones de production arboricoles françaises. La création variétale en arboriculture est très en retard pour ce qui concerne les variétés cultivables en AB ou avec de très faibles niveaux d’intrants, de manière pérenne. C’est un verrou qu’il faut faire sauter pour permettre le développement d’une arboriculture réellement durable à l’échelle du verger français. Cela nécessite l’engagement d’un effort de recherche de long terme, il ne faut plus attendre, la démarche déployée dans le Nord montre que c’est possible. Il faudra pour cela identifier les ressources à même de porter cet effort sur le temps long, ce qui est loin d’être une évidence vu le cadrage temporel des financements actuels. Pour autant, c’est un défi qu’il nous faut vraiment relever et qui est structurant pour l’avenir ». Voilà un chantier auquel s’atteler, et qui dépendra notamment de la volonté des producteurs à structurer des projets dont les bénéfices attendus ne sont pas à portée de main immédiate !
Si vous souhaitez en savoir plus, n’hésitez pas à contacter votre GAB ou GRAB local, l’ITAB ou le Centre de Recherche de Gembloux.
Article rédigé par Diane Pellequer (FNAB) et Claude-Eric Parveaud (ITAB)
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