Des infradoses de sucre en protection du vignoble

Publié le : 27 avril 2020

En 2019 s’achève le CASDAR SWEET, dans lequel divers partenaires ont travaillé sur les applications d’infradoses de sucres sur divers couples cultures/pathogènes ou ravageurs. Ce projet faisait suite au projet USAGE, financé par l’ONEMA et l’idée de ce programme venait de travaux de l’INRA de Versailles (Sylvie Derrij) sur l’utilisation de ces infradoses de sucres contre le carpocapse du pommier.

La problématique vigne

Dans le cadre de ce projet, sur vigne, ont été ciblés divers pathogènes et ravageurs : les tordeuses de la grappe, la cicadelle de la flavescence ainsi que le mildiou et le black rot. C’est à ces deux derniers que nous allons nous intéresser.

Sur vigne nous avons une double problématique : une limitation de l’utilisation du cuivre (28kg/ha sur 7 ans, soit environ 4kg/ha/an) avec toujours une épée de Damoclès avec une éventuelle interdiction donc une urgence à trouver des alternatives. D’autre part, un agent pathogène, le mildiou, Plasmopara viticola, qui peut créer des pertes de récoltes dommageables. Dans certains vignobles, comme la Savoie, il peut être associé, voire dépassé par le black rot, Guignardia bidwelli.

Au fil des 6 années d’essais, il a été étudié l’action de fructose seul, associé à de faibles doses de cuivre sous forme hydroxyde dans un premier temps (avec le produit Kocide), puis avec du sulfate. Sur ses premiers essais, le fructose était dosé à 100 ppm (soit 10g pour 100L). Le cuivre était à dose réduite entre 100 et 150g/ha par passage selon les conditions d’essais et la dose de référence entre 600 (pour les premiers essais) à 400g/ha. Il a aussi été testé, suite aux résultats labo observés sur pommier, des associations de fructose et saccharose, ainsi que des augmentations de doses. Différentes formes de cuivre ont également été testées suite à des réponses diamétralement opposées entre les résultats obtenus avec du Kocide ou avec de la bouillie bordelaise.

Essais du CASDAR SWEET

Deux vignobles ont servi aux essais : le Bordelais avec l’IFV et la Savoie-Dauphiné avec l’ADABio. Trois cépages ont été testés : Etraire de la Dhui, Jacquère et Merlot. Les essais ont été réalisés sur des domaines en AB en micro-parcelles avec répétitions.

On compare la dose de cuivre réduite seule avec les différentes stratégies de sucre associée à cette même dose réduite afin d’évaluer l’apport des sucres et pour la validité de l’essai, on compare également à un témoin non traité et à une référence d’usage.

Synthèse USAGE (2012-2014) et SWEET (2016-2018)

Du projet USAGE, nous ressortions que :

  • Des infradoses de fructose à 100 ppm permettaient de renforcer l’efficacité du Kocide (hydroxyde de cuivre) voire permettaient d’atteindre une protection équivalente à supérieure à la référence à forte dose.

  • A l’inverse, associé à de la bouillie bordelaise, la protection perdait en efficacité.

  • Une utilisation répétée de fructose avait tendance à accentuer les attaques de black rot sur grappes (mais on voyait un léger effet bénéfique sur feuille).

  • Les cépages réagissaient différemment à l’induction par les sucres.

Avec SWEET, nous avons acquis d’autres données :

  • Contre le mildiou, c’est le fructose qui est le plus intéressant (par rapport à une association avec du saccharose).

  • Contre le black rot, une association saccharose + fructose semblerait bénéfique.

  • Plus la pression mildiou est forte moins le gain est marqué et inversement c’est en situation de forte pression black rot qu’on a vu les meilleurs résultats contre cette maladie.

  • La formulation du cuivre joue sur le gain (ou la perte) d’efficacité en ajoutant le fructose.

  • Augmenter les doses de sucres fait perdre en efficacité.

  • Arrêter les sucres à la floraison – nouaison permet de ne pas dégrader l’efficacité contre le black rot.

Conclusion, l’utilisation de sucre est peu onéreuse, en revanche, son intérêt n’a été démontré de façon systématique qu’en association avec du Kocide, c’est moins flagrant avec d’autres cuivres et en situation à risque black rot, il convient de l’arrêter à la nouaison.

Article rédigé par Arnaud Furet, ADABio

Parution initiale dans La Luciole n°24 (Été 2019), le bulletin des pratiques bio en Auvergne-Rhône-Alpes