Christophe Hérault, éleveur de porcs bio post sevreur et engraisseur en bâtiment

Publié le : 26 mars 2019

Le guide « Élever des porcs bio » de la FNAB rassemble des repères sur la filière porcs bio française, les principaux points réglementaires, des conseils pour construire un projet adapté à ses objectifs et des témoignages d’éleveurs de différents systèmes. Parmi eux, Christophe Hérault, post sevreur et engraisseur en bâtiment, installé dans les Deux-Sèvres, produit 550 porcs par an. Il explique sa trajectoire personnelle, l’organisation de son atelier, ainsi que les facteurs de réussite et points de vigilance techniques, économiques et humains.

Pouvez-vous présenter votre ferme ?

Je suis dans une ferme familiale, le GAEC Le Tillac, en polyculture poly-élevage (porc, volaille et vache allaitante et 70 ha de surface en culture et prairie). Mes parents ont conduit la ferme en bio dans les années 70. A cette époque l’agriculture biologique n’avait pas de reconnaissance comme aujourd’hui, le secteur était structuré autour de marques privées. Je me suis installé en 1982 et la ferme est certifiée en bio depuis 1992.

Mon fils s’est installé en 2010, lorsque nous avons créé l’atelier bovin allaitant. Nous sommes 2 personnes à la ferme (2 UTH).

Le potentiel du sol n’est pas élevé, soit des terres asséchantes ou des terres très humides au bord des rivières. Notre rotation se déroule sur 7 ans (rotation type : mélange céréalier + maïs + mélange céréalier + 4 ans de prairie temporaire).

Nous essayons d’avoir une approche systémique, qui privilégie un équilibre entre le végétal et l’animal. Les animaux apportent de la fumure à la terre pour les cultures et les cultures nourrissent les animaux. Notre SAU (Surface Agricole Utile) est cohérente par rapport au nombre d’animaux présents dans la ferme.

Pour l’alimentation des animaux, nous sommes autosuffisants pour les vaches et nous avons une autonomie d’environ 60 % pour les porcs. Tout l’aliment des volailles est fourni par la filière Bodin.

Pourquoi avez-vous créé un atelier porc ?

La crise de l’agneau a fait changer mon fils de production : il est passé de l’ovin allaitant à la production de porcs.

Avant d’être éleveur post-sevrage et engraisseur, j’ai été naisseur-engraisseur. J’avais une petite production de truies (autour de 20) qui me prenait du temps, mais une productivité insuffisante. Le résultat est fortement lié à la performance des truies, qui est souvent fluctuante. Par ailleurs, le bâtiment post-sevrage et engraissement demande moins d’investissement que les bâtiments naissage.

Quels ont été les investissements nécessaires ?

Le bâtiment porc a été auto-construit en 2014, à partir d’un bâtiment repris chez un autre producteur pour un montant de 70 000 €, avec la fabrication d’aliment à la ferme.

Nous avons une surface de 480 m² pour l’engraissement et 80 m² pour le post sevrage. L’atelier porc comprend 240 emplacements pour le post-sevrage et l’engraissement, pour une production de 550 porcs charcutiers par an.

Nous avons acquis 4 cellules neuves de stockage, avec un cône de ventilation pour conserver les céréales, d’un montant de 11 000 €. C’est un confort de travail qui mérite l’investissement.

Comment organisez-vous le post-sevrage ?

Les porcelets, fournis par deux naisseurs du groupement Bio Direct, arrivent à 6 semaines entre 8 et 12 kg.

  • La période du post sevrage, entre le 5ème jour et le 10/12ème jour, demande beaucoup d’observation, au moins deux fois par jour.
  • du 1er au 4ème jour, je distribue l’aliment de démarrage acheté ;
  • entre le 4ème et 8ème jour, les porcs sont rationnés ;
  • entre le 5ème et le 10 / 12ème jour, période la plus critique, je donne de l’argile ou de la terre de la ferme en préventif ;
  • après le 15ème jour et la sortie du post sevrage (entre 4.5 et 5 semaines), je distribue de l’aliment acheté.

Comment se déroule l’engraissement ?

Pendant la phase d’engraissement, les porcs sont nourris avec des aliments produits à la ferme : de la soupe mélangée avec de la farine. La ration est calculée en fonction du nombre de porcs dans chaque case et l’âge des porcs. Pour compléter l’aliment, je rajoute des minéraux et des protéines à hauteur de 24%, et 1% de levure de bière.

Pour l’enlèvement des animaux j’ai aménagé un quai d’embarquement avec plusieurs cases. Cela permet de les isoler et de limiter le stress. J’utilise également un brumisateur pour les calmer et éviter qu’ils ne montent température. Les porcs partent entre 115kg et 130 kg, autour des 6 mois et ½.

A chaque enlèvement, je recompose les lots d’animaux avec un changement de case pour casser l’environnement antécédent. Je prête une attention particulière à l’équilibre des lots entre les dominants et les dominés.

Quels sont les éléments à connaître et à maîtriser pour réussir ce type de production ?

Entre deux lots de post-sevrage, il est nécessaire de bien désinfecter et de faire un vide sanitaire de 8 jours. J’emploie des produits à base de plantes pour désinfecter, puisse je passe le karcher. Pour sécher le béton, j’utilise un booster pour éviter les nids d’humidité sur le sol.

Pour l’engraissement, il est essentiel que le bâtiment soit propre et paillé régulièrement, car l’ammoniac se dégage facilement. La bonne ambiance du bâtiment (bien aéré et sec) permet de limiter les problèmes de boiterie. Pour le post-sevrage, la température idéale est entre 25°C à 26°C pendant les 8 premiers jours (variable selon la saison).

Nous produisons 60 % de l’alimentation des porcs. C’est un atout économique indéniable dans une optique d’autonomie.

Comment commercialisez-vous votre production ?

Nos porcs charcutiers sont valorisés au sein de la filière Bio Direct. Ce groupement garantit une transparence sur les prix et le chiffre d’affaires, et laisse l’éleveur libre d’acheter l’aliment où il le souhaite.

Facteurs de réussite

Des investissements cohérents :

  • Le bâtiment en auto-construction a limité le coût de la conversion ;
  • L’investissement dans une fabrique d’aliment à la ferme avec une capacité de stockage adaptée à chaque matière première garantit un confort de travail et une autonomie.

Une organisation du travail qui limite les risques à la période décisive du post-sevrage :

  • L’éleveur pratique un vide sanitaire entre 2 lots de post-sevrage ;
  • L’éleveur consacre du temps à l’observation des porcelets.