Le picage dans les élevages de poules pondeuses biologiques

Publié le : 23 février 2018

Le picage est un problème important en termes de bien-être animal en élevage de poules pondeuses conventionnel comme en élevage biologique. Actuellement, l’épointage est la principale solution mise en œuvre en France pour limiter les conséquences de ce comportement mais cette pratique est remise en cause par la société et en cours d’interdiction dans plusieurs pays européens. Le programme de recherche CASDAR Épointage (2015-2018), piloté par l’ITAVI, vise à proposer des solutions pour limiter le picage en élevage de poules pondeuses non épointées, ainsi que les problèmes de santé et de bien-être associés. Retour sur l’enquête épidémiologique qui a permis de dresser un état des lieux des problèmes de picage rencontrés dans les élevages de poules pondeuses en France.

Picage et épointage en élevage de poules pondeuses biologiques

Le cahier des charges de l’Agriculture Biologique repose sur plusieurs principes dont le principe de bonne santé qui inclut notamment la notion de bien-être. Chez les volailles, un des problèmes de bien-être rencontré en élevage est celui du picage. Le picage est défini comme l’action de picoter, tirer et souvent arracher les plumes de ses congénères ce qui peut entrainer des blessures et conduire à du cannibalisme. Afin de limiter les conséquences de ce comportement, l’épointage du bec est pratiqué sur les poules pondeuses en élevage biologique comme en élevage conventionnel en France. Ce traitement de l’extrémité du bec est actuellement effectué au couvoir à 1 jour d’âge par rayonnement infra-rouge. Cependant, dans certains pays d’Europe du Nord, la pratique de l’épointage est interdite (Suède, Danemark, Autriche) ou est/a été remise en cause (Pays-Bas, Allemagne, Angleterre). Qu’en est-il des problèmes de picage dans les élevages de poules pondeuses biologiques en France ? Serait-il envisageable d’y élever des poules pondeuses non épointées ?

État des lieux du comportement de picage dans les élevages bio en France

Afin de répondre à ces questions, une des actions du projet CASDAR Épointage a été la réalisation d’une enquête dans les élevages de poules pondeuses biologiques en France. L’objectif était d’identifier l’ampleur des phénomènes de picage dans les élevages de poules français et de mieux comprendre les facteurs associés à ce comportement. Pour cela, 33 lots conduits selon le cahier des charges de l’Agriculture Biologique ont été enquêtés entre mai 2015 et juin 2016 dans les principales régions de production d’œufs français : 7 lots en Bretagne, 16 lots en Pays de la Loire, 3 lots en Nord-Pas de Calais et 7 lots en Rhône-Alpes.

La notation de l’état d’emplumement des poules à environ 60 semaines d’âge ainsi que le relevé de la mortalité en fin de lot ont permis de classer les élevages en fonction de la présence ou non de picage et de son degré d’importance. 26 lots sur 33 ne présentaient pas de picage sévère (emplumement correct) et 7 lots présentaient du picage sévère (emplumement dégradé) dont 1 avec une mortalité élevée que l’on peut assimiler à un cas de cannibalisme. Ainsi, au moment de l’étude, 21,2% des lots étaient concernés par du picage sévère et 3% par du cannibalisme. La présence de picage sévère et/ou de cannibalisme dans ces lots a été confirmée par les éleveurs.

Prévention du picage dans les élevages de poules pondeuses au sol avec parcours

Pour mieux comprendre les facteurs associés au comportement de picage, un questionnaire a été rempli lors d’un entretien avec l’éleveur pour chaque lot de poules pondeuses étudié. Il a permis de collecter les données suivantes : les caractéristiques de l’exploitation et du bâtiment, les données de production et de santé du lot, les pratiques d’élevage ainsi que les évènements survenus au cours du lot. Après analyse des données, les résultats de l’étude ont montré que l’utilisation de certaines souches génétiques, associée à une optimisation de l’utilisation du parcours et une bonne gestion de la lumière dans des bâtiments d’élevage récents situés dans la moitié Nord du territoire français, limite les risques de déclenchement du picage.

Par ailleurs, les éleveurs ont été interrogés sur les mesures mises en place spontanément à titre préventif ou curatif pour limiter les conséquences du comportement de picage sur leurs lots. 13 éleveurs ont déclaré mettre en place les mesures suivantes : la gestion de l’intensité lumineuse dans le bâtiment, l’enrichissement du milieu (bidons, ficelles, combinaisons suspendues, paille dans des filets suspendus, scotch orange, radio), l’ajout d’un complément à l’aliment (coquille d’huitre ou chlorure de magnésium), l’augmentation du nombre de repas par jour, la maitrise des poux rouges et la diminution de la densité.

 

D’une manière générale, l’étude « Épointage » a montré que des cas de picage étaient présents dans les élevages de poules pondeuses épointées en élevage biologique mais aussi en élevage plein-air ou en cages aménagées. Les travaux de recherche visant à diminuer ce comportement se poursuivent donc, notamment en stations expérimentales, pour permettre, à terme, de proposer des solutions pour limiter le picage en élevage de poules pondeuses non épointées, ainsi que les problèmes de santé et de bien-être associés.

 

Les auteurs remercient les éleveurs qui ont participé à l’étude ainsi que les techniciens et organisations de production. Le projet CASDAR Épointage a été piloté par l’ITAVI et réalisé par les partenaires suivants : ANSES, ISA Lille et la Chambre Régionale d’Agriculture des Pays de la Loire. Il a été financé par le Ministère de l’Agriculture et a reçu le soutien du RMT Bien-Être Animal.

Contacts :

  • Jenna COTON – jenna.coton[at]anses.fr
  • Maryse GUINEBRETIERE – maryse.guinebretiere[at]anses.fr