Expérimenter le blocage de ponte avant traitement à l’acide oxalique

Publié le : 15 janvier 2016

Contre le varroa, des apiculteurs ont testé la méthode consistant à bloquer la ponte de la reine au moyen d’une cage de petite taille avant un double traitement flash à l’acide oxalique (AO) en saison estivale. Quels facteurs de réussite ont-ils identifiés ?

Une commande groupée de cagettes à reine

Une commande groupée de cagettes à reines de type « Scalvini » a été proposée au sein du réseau FNAB par l’intermédiaire d’Agribio 13 : plus de 6500 cagettes ont été commandées par une soixantaine d’apiculteurs d’un très large quart sud-est de la France, mais aussi du sud-ouest (avec le concours de l’ADAM et de l’ADAQ), ainsi que d’Alsace (via l’OPABA), profitant ainsi de tarifs attractifs.

Ce format de cage (70mm/70mm, épaisseur 17 mm, alvéoles réduites dans le fond de la cage) permet à la reine de continuer son activité de ponte sans que les larves ne parviennent à maturité, évitant ainsi de perturber la colonie en pleine saison estivale.

Un bilan largement positif

Pour ceux qui ont déjà mis en place les cagettes et réalisé les 2 traitements AO, généralement par sublimation, le bilan est très largement positif, sans que celui-ci n’ait été conjugué à aucun autre traitement. Ils estiment que la pression du Varroa a été fortement diminuée, voire quasiment supprimée. Tous ont exprimé leur satisfaction vis-à-vis de la méthode, et la recommanderaient sans hésiter à un confrère. En revanche, tous ont mentionné des difficultés et en particulier :

  • Une charge de travail importante, qui plus est en pleine chaleur et dans une époque de l’année déjà intense (récoltes, transhumances…)
  • La difficulté de trouver les reines rapidement si celles-ci ne sont pas marquées
  • Une tendance à favoriser les phénomènes de pillage
  • Des cas de non-acceptation des nouvelles reines pour un apiculteur ayant profité de l’opération d’encagement pour remplacer une partie des reines
  • Quelques phénomènes de dépeuplement et de supersédure accrus des colonies ont également été observés.

La mise en cage s’est effectuée entre la fin juillet et la mi-août. La durée d’encagement a été en moyenne de 21,02 jours. Les traitements AO ont été pratiqués au moment du décagement, puis répliqués 3 à 6 jours plus tard. A noter le témoignage de certains apiculteurs conventionnels qui disent mettre en place cette technique dans le cadre d’une démarche de transition progressive vers la bio.

Les facteurs de réussite relevés par les apiculteurs utilisant des cages 

– Le marquage systématique des reines,
– Une bonne organisation du chantier et des ruchers, de façon à optimiser le travail et limiter les essaimages naturels,
– Effectuer le travail collectivement avec d’autres apiculteurs compétents pour optimiser la rapidité de l’intervention,
– La mise en place d’un système de comptage de Varroa efficace après traitement,
– Une optimisation de l’élevage de reines afin de répondre aux besoins,
– Favoriser les échanges entre apiculteurs ayant testé cette technique.

« La méthode nous semble très satisfaisante »

Jorris Van Bergen et Philippe Chavignon apiculteurs au rucher Bio des Gorges de Daluis à Guillaumes dans les Alpes Maritimes, ont pris part à la commande collective et mis en œuvre la technique.

« Nous avons appliqué la méthode à 55 ruches sur un rucher qui en compte 78 (NDLR : l’exploitation en compte entre 150 et 200 au total). Travaillant essentiellement avec des abeilles « noires », la raison principale de cette application partielle de la technique était la crainte que les ouvrières deviennent agressives envers les reines. C’est d’ailleurs arrivé dans 3 cas : une a été retrouvée morte dans la cage, et deux autres ont disparu peu après la libération.

La mise en cage a été effectuée avant la fin de la miellée de lavande, et les reines ont été libérées le 5 août, après 21 jours de blocage de la ponte. L’acide oxalique a été appliqué en une seule fois, car notre vieux sublimateur n’a pas fonctionné au moment de libérer la reine. Nous avons donc emprunté un appareil à une collègue apicultrice pour effectuer le traitement quelques jours plus tard. L’efficacité a été très bonne malgré tout, un comptage a postériori ayant révélé un taux d’infestation de 0 à 0.5 varroas pour 100 abeilles, alors que sur les autres ruches, ça tournait autour de 3 ou 4 pour 100. »

« J’ai clairement vu la différence entre les ruches traitées et non traitées », dit Jorris. « Quelques semaines après la libération, on a trouvé un très beau nid de couvain, comme si la période d’encagement avait redonné du dynamisme à la reine, même si, par la suite, on est rapidement revenu à la normale. En résumé, la méthode nous semble très satisfaisante. L’année prochaine, nous la généraliserons à toutes les colonies sans hésiter ! »

Au niveau des autres traitements, Jorris estime raisonnable de continuer à appliquer un acide formique au moins au printemps. Quant au Thymol, il n’est d’ores et déjà plus utilisé du tout sur l’exploitation.

Article rédigé par Rémi Veyrand, Agribio13