Concilier grossesse et maraîchage de façon sereine ça se prépare !

Publié le : 22 décembre 2021

Mener de front une grossesse et une activité maraîchère, est-ce possible ? Le chamboulement physique et psychique que constitue la grossesse puis l’arrivée d’un enfant peut sembler difficile à concilier avec l’intensité de l’activité maraîchère. Retours d’expérience de Sande Jeusset et Clara Dupré, deux cheffes d’exploitation ayant été enceintes tout en étant maraîchères, qui reviennent ici sur l’organisation qu’elles ont mise en place. L’occasion aussi de faire un point sur l’amélioration des conditions de prise en charge du congé maternité depuis le 1er janvier 2019.

Préparer sa grossess en maraichage

Sande Jeusset est maraîchère dans le Loiret sur 3ha, et emploie un salarié. Elle vient d’accoucher de son 3ème enfant. Clara Dupré est quant à elle maraîchère en Indre-et-Loire, sur 1 ha et était seule sur l’exploitation lors de sa seconde grossesse.

Y-a-t-il une période plus propice qu’une autre vis-à-vis de l’activité maraîchère pour une grossesse ?

Les deux maraîchères se rejoignent, mieux vaut éviter les deux premières années suite à l’installation, où toute l’énergie se focalise sur la construction de l’activité. Si possible, l’idéal est ensuite de planifier une naissance en hiver, pour que la fin de grossesse et les premières semaines avec le nouveau-né aient lieu lors d’une période plus calme.

Comment adapter son activité physique ?

Clara, qui a accouché en juillet, a commencé à limiter son activité à partir du 6ème mois de grossesse, en arrêtant les travaux de plantation, désherbage et récolte mais en continuant à réaliser l’irrigation, le suivi des cultures, l’administratif et les ventes jusqu’à un stade avancé.

Sande, qui a accouché durant l’hiver a elle aussi travaillé jusqu’à un stade avancé, assurant la production et les ventes. « Mon gynécologue avait bien compris qu’il était impossible pour moi de m’arrêter : il m’a conseillé de ne pas changer de rythme de vie, mon corps étant déjà habitué, en faisant par contre plus de pauses et en m’écoutant plus ».

La sage-femme Anne-Cécile Goletto confirme : le plus important est de savoir écouter son corps et de s’y adapter. Par ailleurs, elle conseille de limiter le port de charges lourdes, afin de ne pas sursolliciter le dos et le périnée et d’utiliser une galette gonflable si l’on fait du tracteur pour limiter les chocs. Enfin, le port d’une ceinture de grossesse sans baleine peut aider à maintenir une meilleure posture du dos et du bassin.

Se faire remplacer sur la ferme : c’est maintenant entièrement gratuit !

Depuis le 1er janvier 2019, le remplacement des agricultrices lors de leur congé maternité est entièrement pris en charge. La durée du congé est de 4 à 6 mois, en fonction du nombre d’enfants. Durant cette période l’exploitante peut se faire remplacer, en passant par le service de remplacement de son département. En cas d’impossibilité de remplacement, une indemnité journalière est prévue.

Il est possible de se faire remplacer jusqu’à 60h/semaine. « Il est important de ne pas sous-estimer ses besoins », explique Sylvia Thomas, animatrice au service de remplacement du Loiret, « c’est un remplacement, l’objectif est de profiter de sa grossesse et des premières semaines avec son nourrisson ».

Le remplacement est entièrement gratuit et toute la partie administrative liée au salariat est gérée par l’association. « C’est le service de remplacement qui est employeur, il n’y a aucune démarche administrative à réaliser vis-à-vis du salarié, pas même de facture car tout est directement pris en charge ».

Les démarches à mener pour se faire remplacer :

Afin de pouvoir bénéficier du congé de maternité, il est nécessaire de faire une demande d’accord de congé de maternité à la MSA, en envoyant une demande d’allocation de remplacement maternité, suite à l’envoi de la déclaration de grossesse. Sylvia Thomas insiste : «Il est important de faire rapidement cet envoi, car il existe un délai incompressible de 1 mois entre la demande d’allocation de congé maternité et la date du début de son congé. Il ne faut pas hésiter à nous appeler s’il y a besoin de conseils.». La MSA transmet ensuite le dossier au service de remplacement de son
département, qui s’occupe de recontacter la cheffe d’exploitation.

Il est aussi nécessaire d’adhérer au service de remplacement (compter une cinquantaine d’euros pour l’adhésion annuelle).

Le remplacement en pratique, ça se passe comment ?

Le salarié peut remplacer l’exploitante sur tout type de tâche : production, livraison, vente… En semaine ou sur les weekends. Dans le cas d’un remplacement à hauteur de 60h/semaine, il est obligatoire d’avoir recours à deux salariés (un contrat de travail ne pouvant excéder 48h/semaine) qui ne doivent pas être présents en même temps sur la ferme. Si le service de remplacement peut proposer des agents de remplacement,
il est tout à fait possible de proposer soi-même un salarié pour le remplacement. Il est important de trouver la personne qui correspond, fiable, motivée et ayant de préférence déjà travaillé sur la ferme.

C’est le premier conseil de Sande et Clara : « se faire remplacer par quelqu’un qu’on a vraiment choisi et en qui on a pleinement confiance ». Les maraîchères ont toutes deux fait appel à d’anciens stagiaires en BPREA qui connaissaient leur ferme. Il est d’ailleurs possible de passer en remplacement un salarié déjà présent sur la ferme : « j’ai embauché un salarié pour m’aider à partir du sixième mois de grossesse, puis lorsque mon congé de maternité a été activé, c’est le service de remplacement qui est devenu employeur. », explique ainsi Clara.

Article paru dans le Taupin du maraîcher n°23, avril 2020