Bonnes pratiques pour travailler avec la biodiversité en arboriculture

Publié le : 11 décembre 2024

Une quarantaine de producteurs ont participé aux rencontres « Biodiversité dans les fermes » en arboriculture et maraichage organisées par SOLAGRO, AGRIBIO Rhône & Loire et les chambres d’agriculture du Rhône et de la Loire au printemps 2023. Revenons sur les bonnes pratiques mises en avant en arboriculture sur la ferme de Pierrick Jasserand à Pollionnay (69).

Collecte des auxiliaires sur la bande fleurie implantée au verger des Presles

Réussir l’implantation de ses bandes fleuries

Annabelle Richard, chargée de projets Agroécologie-Biodiversité à Solagro, présente les critères de réussite de l’implantation d’une bande fleurie en verger :

  • Déterminer la composition de la bande fleurie à partir des ravageurs problématiques rencontrés sur le verger, croisés aux résultats d’études existantes pour favoriser les ennemis naturels de ces ravageurs (Casdar Muscari, EcoOrchard…).
  • Introduire dans le mélange des espèces annuelles et pérennes présentant des périodes de floraison différentes et étalées, pour procurer des ressources aux auxiliaires durant toute la période d’activité (tout début du printemps à fin d’été).
  • Après quelques faux-semis préalables, privilégier un semis à la volée à l’automne ou en toute fin d’été car il permet de bénéficier des pluies de saison et d’assurer une meilleure implantation.
  • En arboriculture, la largeur recommandée pour les bandes fleuries correspond à la distance entre les roues du tracteur. Cela peut dépendre aussi des machines disponibles pour la préparation du sol et de la fauche.
  • Pour entretenir la bande fleurie, une première coupe d’entretien est nécessaire lorsque les plantes ont atteint 30 à 40 cm de hauteur afin d’apporter de la lumière aux semis. La hauteur de coupe doit être d’au moins 8 cm pour maintenir les auxiliaires de la strate herbacée. Deux fauchages peuvent être prévus au cours de la saison en fonction de l’évolution de la bande fleurie pour permettre la germination des graines restantes. Une coupe ou fauchage doit être prévue avant l’hiver pour limiter les dommages liés au gel.

 

Favoriser la présence des chiroptères et des mésanges

Brice Lemaire présente les différents modèles de nichoirs aux agriculteurs

Brice Lemaire, gérant et fondateur de la SARL Agrinichoirs, est revenu sur les cycles et la biologie des chiroptères et des mésanges, auxiliaires généralistes, pour l’installation de nichoirs à mésanges et d’abris à chauve-souris.

Quelques chiffres ont été mis en avant : les mésanges chassent les insectes rampants et marchants et consomment 400 à 900 insectes par jour en période de nourrissage des jeunes et pendant trois semaines de 5 h à 20 h sur la période de nidification. La chauve-souris réalise une prédation de nuit et se nourrit d’insectes en plein vol, jusqu’à 3000 insectes par nuit. AgriNichoirs préconise d’installer 10 nichoirs à mésanges par hectare et 10 abris à chauve-souris par hectare ainsi que 1 ou 2 nichoirs à faucon crécerelle et chouette chevêche sur deux hectares. Pour les mésanges, les nichoirs peuvent être en PVC, en roseau en passant par le bambou. Les modèles proposés ont évolué pour utiliser du matériel plus durable et plus stable dans le temps et plus facile d’utilisation.

 

Infrastructures agroécologiques (IAE) à privilégier pour accueillir les pollinisateurs

Concernant les pollinisateurs, Danny Lebreton, chargé de mission entomologie & agroécologie à Arthropologia, explique que les abeilles sauvages sont les plus intéressantes pour la pollinisation, et que si la ressource alimentaire est très importante pour les abeilles, la ressource de nidification l’est également. La grande majorité des abeilles sauvages nichent au sol. L’intérêt est d’avoir un cortège d’habitats suffisamment variés pour maximiser les chances de développement des auxiliaires et des pollinisateurs. Dans l’idéal, il faudrait 30 % de la surface en infrastructures agroécologiques dans les fermes.

RÉSULTATS DE SUIVIS FAUNISTIQUES ET FLORISTIQUES SUR BANDES FLEURIES

L’analyse de suivi faunistique et floristique réalisée au printemps 2023 par Solenn Caulet Lardenois Armsbruster, stagiaire à Solagro, sur des bandes fleuries mises en place par les arboriculteurs et maraîchers du réseau (5 fermes au total), montre une abondance plus importante des prédateurs terrestres carabes et araignées (prédateurs généralistes importants des ravageurs de cultures), dans les bandes fleuries et les cultures adjacentes aux bandes fleuries que dans les bandes témoins. Ces premiers résultats à conforter, montrent que globalement les bandes fleuries favorisent la présence des auxiliaires et la biodiversité.

Analyse 1 : Richesse taxonomique en carabes en fonction des modalités d’enherbement

Analyse 1 : Richesse taxonomique en carabes en fonction des modalités d’enherbement

BF = Bande Fleurie ; Cult-BF = Cultures adjacentes aux Bandes Fleuries ; Cult-T =Cultures adjacentes aux bandes témoins ; T = Bandes Témoins

L’analyse montre que globalement il y a une diversité chez les carabes significativement plus importante dans les Bandes fleuries que dans les bandes spontanées. On constate également que les cultures adjacentes aux bandes spontanées ont moins de diversité de carabes que les cultures adjacentes aux bandes fleuries. Les carabes sont favorisés par les bandes fleuries car elles leur permettent d’hiverner et de trouver certaines des proies secondaires. Ils sont donc déjà présents à la sortie de l’hiver, et efficaces, lorsque les ravageurs commencent à apparaître.

Analyse 2 : Comparaison de la richesse taxonomique des auxiliaires volants en fonction des modalités d’enherbement

BF = Bande fleurie
T = Bande Témoin

Des larves de coccinelles, des syrphes, des hyménoptères parasitoïdes, des cantharides ont pu être observés dans les filets à papillons passés sur une des bandes fleuries semées chez Pierrick Jasserand, arboriculteur à Pollionnay, membre du groupe Ecophyto des 30 000.

Les résultats montrent qu’il y a une diversité plus importante d’auxiliaires volants dans les bandes fleuries par rapport aux témoins sans toutefois qu’une famille domine.

Parmi les pollinisateurs, les syrphes et les chrysopes sont particulièrement intéressants car leurs larves consomment des pucerons. La présence de bandes fleuries permet aux adultes de se nourrir de nectar et de pollen et de pondre à proximité des cultures. Ainsi, leurs larves aphidiphages se développent sur les cultures adjacentes y consommant les pucerons présents.

Analyse 3 : Comparaison de l’abondance de pollinisateurs en fonction des modalités d’enherbement

Ce dernier test, montre qu’il y a une abondance significativement plus importante de pollinisateurs dans les bandes fleuries que dans les bandes témoins. La présence des bandes fleuries, en attirant davantage de pollinisateurs est susceptible d’augmenter la pollinisation dans les cultures adjacentes, service écosystémique non mesuré au cours du stage.

Rédaction

Pauline Bonhomme, chargée de mission AGRIBIO Rhône & Loire

Caroline Gibert, responsable agroécologie & biodiversité, Solagro

 

Article publié dans La Luciole n°42, le bulletin des pratiques bio en Auvergne-Rhône-Alpes.
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