Au travail pour la reconnaissance du métier de paysan herboriste !

Publié le : 25 septembre 2018

Le 21 mars 2018, une vingtaine de producteurs et cueilleurs de plantes de toute la France se sont réunis à Brousse dans le Puy-de-Dôme pour la 2ème Assemblée générale de la Fédération des Paysans Herboristes (FPH). Celle-ci a été créée à l’initiative de producteurs de plantes médicinales et aromatiques pratiquant la vente directe, et regroupe dès à présent notamment le Syndicat SIMPLES (Syndicat intermassifs pour la production et l’économie des Simples), la FNAB et le MABD (Mouvement d’agriculture biodynamique).

L’objet de cette fédération est de rassembler les producteurs de plantes médicinales et aromatiques en vente directe pour porter d’une même voix la spécificité de « paysan-ne-s-herboristes », notamment dans la proposition de loi en cours et défendre la place des producteurs au sein des métiers de l’herboristerie. Fin 2015, un travail parlementaire a été initié par le sénateur Joël Labbé  afin de proposer une loi qui permette d’encadrer et de pérenniser les métiers de l’herboristerie. Pour en savoir plus, voir l’article « Une mission d’information du Sénat se penche sur le développement de l’herboristerie et des plantes médicinales« .

Deux enquêtes auprès des producteurs et des consommateurs

Dans cet objectif, 2 enquêtes ont été menées pour connaître le poids des paysans herboristes et de leurs pratiques.

Une enquête auprès des consommateurs de plantes a été lancée mi-2016 et a recueilli presque 1500 réponses. Celle-ci est portée par la FPH a permis d’appuyer la voix portée par les paysans herboristes dans le cadre du projet de loi, mettant en évidence l’importance de l’utilisation des plantes par les consommateurs, leur confiance envers les producteurs qui les produisent et ce qu’ils connaissent d’elles et leur volonté de pouvoir leur demander conseils.

La 2ème enquête a été lancée auprès des producteurs de plantes en vente directe par la FNAB et la FPH via la FRAB Aura au cours du 1er semestre 2018. Près de 230 producteurs, principalement du Massif Central, du Sud-est et de la Bretagne ont répondu. L’objectif de ce questionnaire : dresser une typologie des producteurs de PPAM en vente directe et des chiffres sur leur activité, afin de répondre à une mission parlementaire menée en 2018, qui a auditionné l’ensemble des acteurs du secteur afin de préparer la proposition de loi sur l’avenir des métiers de l’herboristerie.

Enquête « producteurs de PPAM en vente directe » : premiers résultats

Une réglementation complexe

Pour 50 % des producteurs, la réglementation complexe et multiple sur les plantes est le principal problème rencontré dans la pratique de leur métier.

La production, la conduite des cultures, les conditions et le temps de travail, sont également cités par 25 % des producteurs ayant répondu. Les débouchés, les filières et le prix de revient sont un problème pour 20 % d’entre eux. L’isolement et le besoin de collectif ont aussi été cités quelques interrogés.

Les producteurs ont également été questionnés sur le principal problème rencontré quant à la commercialisation de leurs cultures. Là encore, la réglementation complexe et les débouchés en vente directe, accompagnés de l’impossibilité d’accompagner leur vente par du conseil ressortent principalement. L’interdiction de prodiguer des conseils par écrit sur leurs produits les oblige à commercialiser sur les marchés (plutôt petits) ou à la ferme (2/3 des producteurs interrogés) pour pouvoir conseiller oralement leurs clients. Seuls 12 % déclarent vendre sans conseil, ni information sur leur produits.

Une concurrence sur les prix en vente directe qui émerge

Les producteurs notent aussi que dans certaines régions, la concurrence sur ces créneaux est réelle et les ventes très saisonnières. Pour les nombreux producteurs qui commercialisent tout (8 %) ou partie (74 %) en magasins ou dépôts vente, la concurrence existe aussi, mais plutôt avec de gros opérateurs. Dans tous les cas, la rentabilité, le temps de travail et l’application d’un prix de vente rémunérateur posent réellement question.

Cette concurrence entre producteurs sur les créneaux de vente directe n’en est peut-être qu’à ses débuts. En effet, 40 % des producteurs ayant répondu au questionnaire se sont installés depuis moins de 2 ans (et 64 % depuis moins de 5 ans). Pour tous ces nouveaux producteurs, les questions de circuits de vente adapté et de prix de vente rémunérateur pour une activité rentable et durable doit être au cœur de l’élaboration de leur stratégie pour que leur installation soit pérenne. En effet, 72 % des installées depuis moins de 3 ans déclarent un chiffre d’affaire inférieur à 10 000 €/an. Les échanges entre eux, ainsi qu’avec les producteurs en place doivent être au cœur de la mise en place de leur projet, que ce soit via les groupes d’échanges organisés au sein du réseau FNAB ou de manière plus informelle.

Nuançons toutefois : même si pour 77 % des producteurs, la production de PPAM pour la vente directe est l’activité principale, 23 % ont tout de même une autre activité non agricole qui permet de les sécuriser économiquement.

Une production diversifiée

Les producteurs de plantes essaient d’avoir une production diversifiée. 69 % d’entre eux commercialisent entre 10 et 50 plantes différentes et 16 % entre 50 et 100, valorisé classiquement en plantes sèches, cosmétiques, huiles essentielles, hydrolats et produits alimentaires (gelées, sirops, …). Notons que pour cette gamme alimentaire, les producteurs sont moins concernés par la problématique des allégations et conseils.

En Auvergne, les besoins des producteurs en écho aux résultats de l'enquête

Depuis début 2018, la FRAB Auvergne Rhône-Alpes relance la dynamique d’animation autour des PPAM bio en Auvergne.

Les producteurs installés partagent en effet un sentiment d’isolement dans leurs fermes et souhaitent se retrouver pour échanger sur leurs problèmes et réussites.

Parmi les envies des producteurs auvergnats : travailler sur les itinéraires techniques, les mises en culture, la gestion des productions. Des demandes particulières ont été formulées sur certaines plantes comme la bourrache, la carotte sauvage, la lavande et l’arnica. Les producteurs de PPAM en vente directe doivent produire une grande diversité de plantes et il est difficile d’en maîtriser toutes les cultures. Aussi, certains imaginent mutualiser la culture de quelques-unes pour un « collectif informel » : chacun produit en plus grande quantité une plante et la fournit pour les autres. Il pourrait aussi y avoir des échanges ou ventes de productions en surplus entre producteurs. Ce pourrait être aussi le support pour des réflexions autour de la rentabilité, de la concurrence… Des sujets qui font écho aux premiers résultats de l’enquête de la Fédération des Paysans Herboristes.

Article rédigé par Coralie Pireyre, FRAB AURA