Tout savoir pour un bon plan plants

Publié le : 19 décembre 2024

Ça y est, on voit le soleil, les jours rallongent, l’envie de démarrer une nouvelle année est là ! Avant de s’emballer, il faut partir à point… en commençant par faire ses plants. Difficile ? Risqué ? Voici des informations incontournables sur ce sujet… incontournable.

En production de légumes, le poste « semences et plants » est assez lourd dans la comptabilité, de l’ordre de 6o à 8o % des charges opérationnelles. C’est une part importante en proportion, mais aussi en valeur, puisque certains producteurs avancent des coûts à plus de 1o ooo €/ha, la moyenne se situant autour de 4 ooo à 5 ooo €/ha. Cette forte variabilité s’explique entre autres par la surface d’abris sur la ferme ainsi que par le choix ou non d’acheter majoritairement ses plants en mottes plutôt que de les autoproduire, voire de semer en direct.

Avant de se lancer sur l’autoproduction de plants, plusieurs aspects doivent être étudiés :

  • intérêt : demandant du doigté (main verte) et de la rigueur, cet atelier devra passer en priorité, certaines opérations étant à réaliser le jour J. Ne pas être à jour en production de légumes est déjà un point difficile, tout retard sur les plants mène rapidement à la catastrophe ;
  • réglementation : en fonction de la taille de cet atelier, et surtout de la vente des plants auprès de collègues producteurs ou du grand public, des obligations réglementaires sont à respecter ;
  • matériel : tables de semis, motteuse, plaques, surface de production et de durcissement, autant d’outils qui doivent être bien dimensionnés pour accueillir et faire patienter l’ensemble des plants sans mettre en péril la production des séries à venir. Le turnover serré est une qualité ici !
  • terreau : le poste « plants maison » est un gros consommateur de terreau, intrant souvent acheté. Il est cependant envisageable de gagner en autonomie sur cet aspect ;
  • semences : afin d’organiser ses plannings, il est indispensable de disposer des semences en avance. Le stock pourra parfois être conséquent, en fonction de la quantité et de la gamme de plants à produire ;
  • itinéraires techniques : il est nécessaire de bien connaître les calendriers, les temps de levée, les saisons pour chaque légume.

ITINÉRAIRES TECHNIQUES POUR PLANTS À CHAUD

Les plants de ces espèces, qui ont besoin de chaleur dès la levée, sont les plus longs à produire, et les plus chers. Ils corrépondent à la gamme des légumes d’été sous abri : tomate, aubergine, poivron, concombre, courgette. Quelques conseils généraux :

  • le milieu et l’air doivent être chauds dès le départ (20 °C) ;
  • possibilité de commencer en alvéoles, puis repiquage au stade juvénile (cotylédon étalé/2 feuilles vraies) ;
  • l’arrosage peut occasionner un stress, avec une eau trop froide par rapport à la température du végétal ou de son milieu, causant des problèmes sanitaires. Privilégiez l’arrosage tôt le matin par bassinage, ou le trempage par-dessous ;
  • en sortie de pépinière, programmez une période de durcissement des plants, en zone plus fraîche et avec un léger courant d’air, qui donnera de l’épaisseur aux plants.

 

Produire ses plants ou les acheter : avantages et inconvénients

 

Conditions de référence pour les tomates, aubergines et concombres (sources : CTIFL et réseau GAB- FRAB)

Le pilotage de ces plants peut être assez pointu : après la germination à chaud, des écarts dans les conditions de jour et nuit sont propices à la croissance harmonieuse de la plante. Des nuits un peu plus fraîches que les journées permettent d’obtenir des plants plus compacts.

À noter que le photopériodisme influence également la germination de la semence de la tomate, avec un optimum à 8 h de nuit et 16 h de lumière. Étant donné la période très hivernale de ce semis, cette condition oblige à recourir à un éclairage photosynthétique.

Zoom sur la tomate

Très souple, le plant de tomate peut être démarré par un semis en alvéoles, avec un repiquage en mottes de 6 à 8 cm au stade cotylédon étalé (reprise à 15 °C minimum en nuit). Ensuite, les plants sont distancés au stade 3-4 feuilles, à 10X10 ou 12X12 cm pour favoriser l’accès à la lumière et limiter l’étiolement. Enfin, selon la demande du client, il est possible de greffer sur le porte-greffe de votre choix (Fortamino, Beaufort, Maxifort…) : cette technique nécessite de produire de façon synchronisée le greffon de la variété et le porte-greffe, et de les associer au bon stade.

Caractéristiques de la production de plant de tomate

*ISTA : International Seed Testing Association

ITINÉRAIRES TECHNIQUES POUR PLANTS À FROID

Ces plants ne sont pas démarrés sur des couches chaudes, même si une température élevée de départ (18-20°C) permet d’accélérer la levée. Un contre-exemple assez documenté est la laitue, dont le semis est préconisé à 20°C maximum, voire 16°C chez certains semenciers. Cette limite est liée à la physiologie de la semence et de la plantule, mais également aux phénomènes d’évolution et de surchauffe des matières organiques contenues dans les terreaux (relargage gazeux, minéralisation avec libération forte de N et de P, etc.).

Exemple de la production de plants de choux à la ferme : est-ce toujours une économie ?

II n’est pas si sûr de réaliser des économies dès lors que l’on prend en compte le temps de travail. Prenons l’exemple d’une pépinière classique, en plein champ et pleine terre, de choux pour la production de plants arrachis, soit 500 à 800 m² de pépinière pour 1 ha de choux. Pour un objectif de 10 000 à 12 000 plants/ha, il faut compter 15 000 à 20 000 graines.

Calcul du coût de production de la pépinière de choux

Deux coûts sont à sommer (voir tableau ci-dessus) :

  • les intrants, dont principalement les semences (15 000 graines) ;
  • les heures de travail, tant en mécanisation qu‘en manuel (sarclage final et arrachage), payées ici à 15 €/h, ce qui peut être discutable…

Ainsi, dans cet exemple, la pépinière coûte : 85,70 + 23,75 =  109,45€ les 1000 plants.

Faites le calcul, et si cette activité est une réussite et un plaisir sans stress supplémentaire, testez-vous sur des plants « faciles », tels que les choux et les courges.

Exemple du poireau

Comme les choux, le plant de poireau demande de la place, étant donné les besoins des producteurs. Le plant peut se faire en plaque, sur tout son cycle ou simplement au démarrage, puis être repiqué. Pour faire patienter le plant, on peut le tailler (taille-haie à 10-15 cm) pour limiter le stress par évaporation.

Caractéristiques de la production de plant de poireau

Plus traditionnel, le choix peut se tourner vers la pépinière en terre, sur planche. Différents itinéraires sont possibles, en voici un exemple :

  • travail au cultirateau, puis réalisation de faux semis (à la flamme si possible) ;
  • semis en ligne : 6oo à 1000 m²/ha de culture ;
  • quantité de semences à majorer : pour 1 ha semer jusqu‘à 300 000 graines pour obtenir 180 000 plants, car le taux de levée est de 6o à 7o % (les taux sont meilleurs avec les hybrides) ;
  • levée parfois longue (9 à 20 jours) ;
  • désherbage thermique juste avant la levée ;
  • désherbage manuel au stade crosse ;
  • défense de culture préventive contre le mildiou et la rouille avec en engrais foliaire cuprique, et surveiller les vols de teigne (avril-mai, puis juillet-août)

Une autre possibilité est de produire les plants sur plaques de 240 ou 504, avec 1 graine par motte, au chaud pendant 6 semaines, puis de poser les plaques au sol « en extérieur » sous voile. Le souci reste, si besoin, la fertilisation par surfaçage.

Une dernière possibilité est de commander un film papier présemé et de le poser sur le sol, ceci afin de faciliter le semis et d’éviter le désherbage des premières semaines.

Article rédigé par Manu Bué, GAB 29, initialement paru dans Le taupin du maraîcher