Bovins lait

Avec une consommation de produits laitiers toujours très dynamique et un prix du lait bio à la fois stable et déconnecté du prix du lait conventionnel, la filière bio offre des perspectives d’avenir aux producteurs laitiers qui envisagent la conversion.

Au-delà des aspects financiers, passer en bio nécessite d’abord d’engager une réflexion autour de la cohérence de son système et de s’approprier les grands principes et les techniques de la bio, mais c’est aussi une affaire de convictions.

Les motivations des éleveurs laitiers en conversion bio sont variées mais fortes, et s’accordent sur les bienfaits de l’agriculture biologique en termes de préservation de l’environnement et de la santé. Ces motivations sont fondamentales lors de la conversion, car cette étape peut soulever des difficultés d’ordre technique comme psychologique. Rencontrer et échanger avec des éleveurs bio et avec le réseau des groupements d’agriculteurs biologiques (GAB) facilitera le passage à la bio, en permettant d’identifier et de résoudre les principales difficultés auxquelles l’éleveur peut être confronté.

Éleveur laitier bio, pourquoi pas vous ?

« De l’agriculture conventionnelle au bio : une conversion réussie ! »
Une vidéo du CER FRANCE

« Conversion en bio de la filière lait dans les Hautes Alpes : Ferme des Counières et Biolait. »
Une vidéo d’Eric Dehorter (France 3 – Prioriterre)

 

Retrouvez d’autres témoignages d’éleveurs laitiers sur leur passage en bio.

Retrouvez les fermes de démonstration à visiter.

Conditions de réussite d’une conversion à la bio en lait

Prendre le temps de préparer sa conversion

Une conversion ne se fait pas du jour au lendemain et demande plus ou moins de temps en fonction du système et de son contexte pédoclimatique : en effet, il va falloir tout mettre en œuvre pour faire évoluer votre système de production vers un système le plus herbager et autonome possible.

Viser l’autonomie

Les conversions réussissent quand les exploitations sont autonomes. Ce sont aussi celles qui seront les plus pérennes. En effet, les intrants en bio sont coûteux et l’alimentation n’y échappe pas : il faut donc viser l’autonomie fourragère et l’autonomie protéique.

Plus l’exploitation dispose d’herbe, mieux le système fonctionnera, l’herbe pâturée étant l’aliment le plus économique. Une bonne gestion du parcellaire permettra d’optimiser la production d’herbe et d’améliorer l’état sanitaire du troupeau. Mais l’utilisation efficace de l’herbe requiert de l’observation, du temps, et une méthode rigoureuse. Il faudra tout d’abord se poser la question des surfaces accessibles, pour estimer la part de pâturage dans le système fourrager.

Quel que soit le système alimentaire initial, différentes stratégies fourragères peuvent être mises en place en fonction des possibilités d’évolution de l’exploitation. Pour en savoir plus, consultez la fiche sur les stratégies fourragères des élevages en conversion éditée par le réseau GAB-FRAB Bretagne.

Se rapprocher d’un groupe de producteurs

La recherche d’autonomie engendre beaucoup de changements dans les pratiques culturales. De même, la gestion sanitaire du troupeau peut être source d’inquiétude. Ainsi, se rapprocher d’un producteur qui est en bio depuis plusieurs années peut être d’un grand appui : ces échanges permettront de se conforter dans ses choix, d’avoir son retour d’expériences, de trouver des solutions, de se rassurer…

De même, rencontrer des éleveurs au sein d’un groupe permettra d’échanger sur les difficultés que chacun peut rencontrer, d’éviter les écueils, et de bénéficier de l’expérience des autres. Par exemple, il peut être utile de discuter, avec un collègue ou au sein d’un groupe de producteurs bio, des solutions qui peuvent être mises en œuvre pour réussir à gérer une période de sécheresse.

Être accompagné

Des questions techniques ? Besoins de contacts dans les filières bio ? Besoin d’évaluer la faisabilité de votre conversion ? Contactez les groupements de producteurs bio du réseau FNAB qui accompagnent les agriculteurs dans leur réflexion. Expert de ces questions, notre réseau de producteurs bio vous propose des diagnostics de conversion, des simulations du passage en bio via outil informatique, des études de marché ou encore vous accompagne dans vos démarches administratives (aides, notifications…).

Choisir les modalités de conversion les plus adaptées

Les modalités de conversion doivent s’anticiper. Le choix d’une conversion non simultanée sera plus adapté pour des systèmes déjà proches de la production bio. Quelle que soit le type de conversion, il faut en évaluer les impacts sur la gestion des stocks fourragers à court et moyen termes.

En savoir plus sur les modalités de conversion

Mois de la bio en Alsace : Élever des bovins lait en agriculture biologique
Une vidéo d’Agriculture innovante

Évolution des objectifs de production

Comment raisonner ses objectifs de production ?

En bio, le potentiel de production laitière doit être calculé en fonction du potentiel de production fourragère de l’exploitation. En conventionnel, le système fourrager a tendance à être raisonné en fonction de la référence laitière, alors qu’en bio, c’est la dimension de l’exploitation, le potentiel de production fourragère et les objectifs de l’éleveur en terme d’autonomie qui détermineront le potentiel de production laitière.

Le système doit être étudié de manière globale pour trouver un équilibre entre le nombre de litres de lait par hectare de SAU, le nombre de litres de lait par vache et le chargement. Le nombre de litres de lait par hectare de SAU varie en fonction du parcellaire, du potentiel des sols, de l’accessibilité des prairies pour le pâturage… Le nombre de litres de lait par vache est en moyenne de 5000 litres par an, mais cette valeur reste très variable en fonction des exploitations. Vous devrez vous fixer vos propres objectifs en fonction de votre système, et ne pas confondre la performance économique et la quantité de lait produite par vache qui ne sont pas toujours corrélées. Le chargement animal (nombre de vache par hectare de SFP) diminue généralement lors de la conversion. La surface accessible par vache constitue le quatrième critère à prendre en compte pour trouver l’équilibre du système en termes d’objectifs de production. Les surfaces accessibles devront être optimisées, en restant vigilant à une bonne valorisation des surfaces pâturées autant que des surfaces récoltées.

Comment la production laitière de l’exploitation va-t-elle évoluer lors de la conversion ?

En changeant ainsi de mode de raisonnement, la réalisation d’un quota n’est plus un objectif en soi. La baisse de la production lors de la conversion est très variable d’une exploitation à un autre (en moyenne entre 10 à 20%).

Les principaux facteurs à prendre en compte dans la performance économique de l’exploitation concernent l’alimentation et la santé. Le coût alimentaire doit être maîtrisé et les frais vétérinaires sont amenés à baisser sans pour autant négliger le bon état sanitaire du troupeau.

La gestion sanitaire du troupeau peut être un frein à la conversion. Pourtant, on constate dans les exploitations laitières en conversion que la désintensification de l’élevage permet d’améliorer la santé et de réduire les problèmes sanitaires. L’évolution du système fourrager permet de disposer d’une alimentation plus adaptée à la fonction de ruminant des vaches (plus de fourrages dans les rations), limitant ainsi les problèmes métaboliques.

Les coûts alimentaires seront maîtrisés en faisant évoluer le système fourrager, par une réduction de la consommation de concentrés et une augmentation du pâturage. En effet, les systèmes qui réduisent le plus leurs coûts alimentaires sont ceux qui maximisent le pâturage et ce sont aussi les plus efficients et robustes. Cependant, même les systèmes initialement peu pâturants peuvent trouver une stratégie fourragère adaptée à leur contexte.

En savoir plus sur les stratégies fourragères des élevages en conversion.

« Le passage au bio : pourquoi, comment ? quels changements ? quels freins ? »
Témoignage de Patrice Hamoniaux, éleveur laitier

Points d’attention pour la réussite technique du passage en bio

L’autonomie fourragère et alimentaire

Optimiser son système herbager

Au cœur du système laitier bio, l’utilisation de l’herbe doit être étudiée pour en maximiser la valorisation. Il s’agira tout d’abord de s’intéresser aux systèmes pâturants, de bien maîtriser les pratiques de pâturage, et enfin de faciliter l’accessibilité des vaches au pâturage.

Tendre vers l’autonomie fourragère

En diminuant la dépendance de l’élevage vis-à-vis des fournisseurs extérieurs, l’autonomie alimentaire va permettre d’optimiser le fonctionnement et la robustesse de l’exploitation à long terme en prenant en compte ses caractéristiques et son contexte.

Il s’agira par exemple :

  • d’intégrer du foin de luzerne ou des mélanges prairiaux en tête de rotation
  • de limiter le maïs ensilage dans la ration (1 TMS/VL/an => 10 ares/VL)

Pour en savoir plus, consultez la fiche « L’autonomie alimentaire en élevage biologique » éditée par le GABNOR.

Compléter la ration de fourrage

  • Maintenir la production de céréales de ferme assolées avec les prairies
  • Maîtriser les achats de tourteaux azotés et réfléchir à la production de protéines sur l’exploitation
  • Si besoin, complémenter en vitamines et minéraux en respectant la liste des produits homologués

Le bien-être et la santé des animaux

Le respect des animaux fait partie des grands principes de la bio et se traduit dans les pratiques d’élevage, dans les conditions de logement, dans les conditions d’alimentation, et en termes d’accès à l’extérieur :

Bâtiments :

  • aire de couchage propre et sèche : litière en dur
  • surfaces minimales : 6 m² / tête pour les vaches laitières

Aires d’exercice :

  • possibilité d’aires d’exercices partiellement couvertes
  • surfaces minimales : 4,5 m2 / tête pour les vaches laitières

Pâturage :

  • les bovins doivent avoir un accès permanent à des pâturages pour brouter, chaque fois que les conditions (météo, état du sol…) le permettent
  • le chargement doit être limité pour éviter le surpâturage, le tassement du sol, les pollutions…

Aspects sanitaires :

La gestion sanitaire de l’élevage en bio privilégie la prévention, via l’alimentation et des conditions de logement adéquates.

Quelques règles en bio :

  • Médecines naturelles à privilégier (homéopathie, traitements à base de plantes tels que l’aromathérapie…)
  • Limitation des traitements allopathiques de synthèse : en cas de problème, il est possible d’utiliser des traitements chimiques, y compris antiparasitaires (limités à 3 fois par an) en doublant les délais d’attentes (48h minimum)
  • Interdiction des traitements préventifs et systématiques
  • Autorisation des vaccins, sous conditions.

D’autres leviers peuvent être utilisés :

  • Choisir des races appropriées, pour renforcer les capacités naturelles de résistance des animaux
  • Assurer une croissance saine et équilibrée de l’animal.

Le diagnostic OBSALIM est une méthode de détection et d’observation des signes de carences ou d’excès de l’animal.

Concernant le renouvellement du cheptel, les animaux doivent naître et être élevés en bio. Il est possible d’acheter des animaux conventionnels si des animaux bio ne sont pas disponibles, sous certaines conditions exceptionnelles.

La rotation des cultures

Au-delà de l’interdiction des intrants chimiques de synthèse, quelques grands principes de la bio ont un impact les pratiques culturales.

La mise en place de rotations longues et diversifiées

  • présence indispensable de prairies, et en particulier de légumineuses dans l’assolement
  • alternance de cultures d’automne et de printemps

La gestion de la fertilité du sol

  • fractionnement et répartition de la matière organique
  • importance des légumineuses
  • gestion des effluents :
    • il n’y a pas de chargement maximum ; le chargement global doit permettre de limiter la quantité d’effluents à 170 kg d’azote par hectare et par an ;
    • dans le cas où les effluents dépassent ce seuil, les effluents excédentaires doivent être épandus sur une autre exploitation, obligatoirement sur des surfaces en bio.

La lutte contre les adventices et les maladies par des techniques alternatives

  • passages de herse étrille/bineuse pour désherber
  • choix des variétés et des densités de semis
  • pratique courante de cultures associées (triticale-avoine-pois, blé-féverole…).

En savoir plus sur la conversion des cultures en bio.

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