La castration des porcs en AB

Publié le : 1 avril 2016

Etat du débat et des pratiques dans l’Union européenne

Le respect du bien-être animal fait partie des principes de l’agriculture biologique. Pourtant l’AB est souvent remise en question sur ce sujet. La castration des porcs est l’une des pratiques en débat au niveau européen. Des solutions alternatives sont expérimentées en Europe pour limiter l’odeur de mâle dans la viande. Ces solutions sont-elles compatibles avec la bio ? Comment les mouvements bio se positionnent-ils dans le débat actuel ?

 

Le point sur les réglementations actuelles

Depuis le 1er janvier 2012, la castration chirurgicale des porcs doit être effectuée, le cas échéant, avec analgésie et / ou anesthésie prolongée au moyen de méthodes mutuellement reconnues. La déclaration de Bruxelles signée en 2012 par les producteurs, les industriels de la viande, les scientifiques et les associations européennes de protection des animaux stipule que la castration des porcs mâles devra être abandonnée au plus tard au 1er janvier 2018, sous réserve de disposer de solutions permettant de gérer efficacement les carcasses malodorantes. Cette déclaration n’est pas contraignante réglementairement mais donne clairement la direction future.

Aujourd’hui, dans le règlement bio, la castration est la seule mutilation autorisée de manière systématique, à condition qu’une anesthésie ou analgésie suffisante soit pratiquée par du personnel qualifié (en France on considère que l’éleveur est qualifié) avant l’âge de 7 jours. Dans le cadre de la révision du règlement européen bio, les mutilations sont discutées, notamment la pertinence d’imposer analgésie et anesthésie. Dans le souci du bien-être animal, le Parlement a proposé un amendement prévoyant l’autorisation de produits et méthodes sans emploi d’hormones, afin d’éviter ou de réduire le recours à la castration chirurgicale. Les produits et méthodes proposés à titre d’exemple recouvrent notamment la prévention immunologique de l’odeur de verrat, l’utilisation de sélections génétiques spécifiques avec odeur de verrat plus faible, ainsi que les additifs alimentaires. D’autre part, le Parlement a chargé la Commission de mener une étude dont l’analyse d’impact permettra d’évaluer la possibilité d’interdire à terme la castration des porcelets au niveau européen.

 

Pas d’alternative miracle à la castration

La castration des porcs, qui vise à éviter l’odeur de mâle dans la viande, est combattue par plusieurs organisations de protection des animaux. Une campagne de signatures d’États membres pour mettre fin à cette pratique en 2018 est en cours. L’Espagne, l’Allemagne, le Danemark, la Belgique et les Pays-Bas sont signataires.

 

PRATIQUE ALTERNATIVE

COMPATIBILITÉ AVEC LA BIO

Abattre les animaux mâles plus tôt.

L’odeur de mâle n’apparaît qu’après la puberté du porc, abattre l’animal avant la puberté est donc la solution la plus simple.

 

Cette pratique :

•  Donne une viande de moindre qualité et inadaptée à certaines valorisations (jambon cru…) ;

•  Pousse à une intensification de l’élevage tant dans les pratiques que dans le choix des races (afin d’obtenir un poids carcasse suffisant dans un laps de temps plus court) ;

•  Est incompatible avec l’utilisation de races anciennes.

L’intensification de la production est particulièrement problématique en bio où l’équilibre protéique est déjà délicat, notamment dans l’optique du passage à une alimentation 100 % bio. De plus, on peut s’interroger sur l’impact de cette intensification sur le bien-être de l’animal. En se concentrant sur une pratique (la castration), le risque est de favoriser des modes d’élevage plus nocifs pour l’animal de manière systémique.

La castration chimique

(également appelée de manière impropre immuno-castration)

 

La France l’a estimée incompatible avec la réglementation bio. Il s’agit en effet d’utiliser un produit vétérinaire allopathique chimique de manière préventive, ce qui est interdit. Ce produit est aussi potentiellement dangereux pour les éleveurs, en particulier les éleveuses.

Le tri des viandes :

selon l’âge d’abattage, seule une partie des carcasses peut être  « marquée ». Dans ce cas, il est possible de les transformer à part de manière à masquer l’odeur et le goût de mâle (avec   des épices par exemple).

 

Cette pratique :

•  Peut être coûteuse ;

•  Ne peut être appliquée aux seuls porcs bio dans un abattoir : il faut que l’abattoir le pratique sur l’ensemble des carcasses de porcs. Les bio ne peuvent donc être pro-actifs sur le tri ;

•  Pose des questions sur la compatibilité de ce type de préparation avec les principes de la transformation bio.

Pistes :

sélection de races ne portant pas (ou moins) cette odeur, modification de l’alimentation, des conditions d’élevage…

 

Des recherches sont encore nécessaires.

 

Au-delà de la castration se pose également la question de la gestion de la douleur dans le cadre de cette pratique. Le règlement bio demande l’utilisation d’une analgésie (antidouleur) ou d’une anesthésie suffisante. Pour nombre d’éleveurs, l’anesthésie est une mauvaise idée : les nombreuses manipulations nécessaires augmentent fortement le stress du porcelet, l’anesthésie nécessite un temps de récupération par l’animal bien plus long qu’avec une simple analgésie et la mortalité est supérieure. L’anesthésie obligatoire est pourtant l’une des propositions sur la table aujourd’hui.

 

Le positionnement des producteurs bio en Europe

La première réaction des éleveurs bio face aux revendications des organisations de protection des animaux est la défensive, avec le risque que les évolutions réglementaires se fassent sans eux et sans tenir compte de leurs spécificités.

Dans chaque pays, les mouvements bio ont réagi de manière différente à ce débat. Voici un tableau récapitulatif des orientations prises par les producteurs.